Assouplissement du calendrier d’interdiction des passoires : quelle contrepartie pour les locataires ?

Copropriété - façade écaillée

Interdire la location des passoires en G ? Il faut se rendre à l’évidence, dans un contexte de crise du logement, ce n’est pas sérieux. Des assouplissements au calendrier ont été annoncés, ils doivent encore se traduire dans la réglementation. Problème réglé ? Pas sûr. Car le locataire pour lequel la rénovation était synonyme d’une baisse de charges pourrait aussi s’estimer perdant dans l’histoire.

La loi Climat et résilience était ambitieuse. Trop sans doute, on s’en rend bien compte aujourd’hui au pied du mur. Rénover tous les G dès 2025, c’était trop court. Loin des positions dogmatiques, l’association de consommateurs CLCV en convient. « Si l’on ne peut que souscrire à l’objectif recherché, force est de constater que le calendrier mis en place était beaucoup trop court, à peine plus de 3 ans, surtout pour les logements situés en copropriété. » Simple question de bon sens. Le calendrier de la loi Climat et résilience s’accordait mal avec le temps de décision en copropriété.

Pourtant à quelques semaines de la première échéance, l’incertitude demeure pour les baux en cours. Malgré les annonces qui se multiplient depuis le début d’année, la loi reste inchangée : à partir du 1er janvier 2025 tout ce qui est classé en G ne répond plus aux règles de décence énergétique et ne peut donc plus être loué. Pure théorie bien sûr, aucun locataire ne sera mis dehors, le gouvernement répète à l’envi que la nouvelle règle ne s’appliquera qu’aux nouveaux baux, voire aux renouvellements de baux.

Des assouplissements dans les tuyaux

La question est devenue politique. Depuis plusieurs semaines, les parlementaires s’agitent et multiplient les propositions de loi. Des députés RN qui veulent purement et simplement gommer le calendrier de la loi (proposition de loi rejetée) aux socialistes qui souhaitent accélérer la rénovation énergétique en passant par la proposition de loi transpartisane des députés Bastien Marchive et Inaki Echaniz, sans doute celle qui a le plus de chance d’aboutir aujourd’hui.

Enregistrée le 7 novembre à l’Assemblée nationale, la proposition a déjà reçu le soutien de la ministre du Logement Valérie Létard. Plutôt que de toucher au calendrier et à ses échéances gravés dans la loi Climat et résilience, les deux députés proposent des assouplissements qui ne sont pas sans rappeler ceux déjà annoncés en début d’année par le précédent gouvernement.

Primo, la décence énergétique ne s’appliquera pas à tous les logements en G, mais uniquement aux nouveaux baux, aux renouvellements de baux et aux reconductions tacites à compter du 1er janvier 2025. Deuxio, le propriétaire bailleur pourra être libéré de l’obligation d’atteindre le niveau de performance prévu par la loi lorsqu’il a réalisé tous les travaux de rénovation énergétique techniquement et juridiquement possibles. Enfin tertio, la proposition de loi entend accorder un délai aux copropriétés engagées dans une démarche de travaux, par exemple avec le vote d’un Plan pluriannuel de travaux, afin de laisser un sursis aux propriétaires.

Et pour les locataires de passoires?

Sans toucher au calendrier initial, la proposition de loi permettrait donc de dégonfler sérieusement le stock de logements menacés par une sortie du parc locatif, et de relâcher, un peu, la pression sur nombre de propriétaires bailleurs. Côté CLCV, on a aussitôt réagi pour réclamer une proposition plus équilibrée qui n’oublie pas le locataire.

« Si la mesure peut paraître pertinente, elle se contente uniquement de préserver les intérêts des bailleurs », explique l’association dans un communiqué. A ses yeux, les locataires restent pénalisés avec des charges élevées dans des logements énergivores et il faut donc une contrepartie. « C’est pourquoi il est nécessaire de permettre l’occupation des logements G au 1er janvier 2025 pour ne pas aggraver la tension locative dans les zones les plus tendues, mais également d’indemniser le locataire pour le préjudice subi de vivre dans une passoire énergétique. »

Comment ? La CLCV suggère de plafonner les loyers dans les communes qui ont encadré les loyers (Paris, Lille, Lyon ou Bordeaux), et d’appliquer un abattement sur le loyer pour les autres communes en zone tendue. « Il est nécessaire de permettre l’occupation des logements G au 1er janvier 2025 pour ne pas aggraver la tension locative dans les zones les plus tendues, mais également d’indemniser le locataire pour le préjudice subi de vivre dans une passoire énergétique. »

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