Fin du périple législatif. La loi Habitat dégradé a été publiée au Journal officiel du 10 avril. Pour accélérer la rénovation de l’habitat dégradé, le texte dote les bailleurs, les copropriétés et la puissance publique de nouveaux outils. Dans les copros, elle renforce notamment l’information sur l’état de l’immeuble et facilite la rénovation énergétique. Environ 1,5 million de logements sont aujourd’hui situés dans des copropriétés dégradées ou fragiles.
Un diagnostic structurel
Depuis le temps qu’il était réclamé ! Le diagnostic structurel va enfin voir le jour, « en réponse notamment aux effondrements de Bordeaux et Lille », précise le ministère chargé du Logement. Pas partout, pas systématiquement, aux maires de délimiter des zones d’habitat dégradé où ce diagnostic structurel deviendra obligatoire pour les immeubles de 15 ans. Pour le reste, la loi ne renseigne pas vraiment sur le contenu du diag ou les compétences requises des techniciens chargés de ce diag. Il faudra attendre la sortie des décrets d’application.
Pour éviter de faire doublon avec le Plan pluriannuel de travaux (PPT) qui s’impose peu à peu dans les copropriétés, ce diagnostic structurel ne sera pas exigé lorsque la copro a déjà réalisé son projet de PPT.
Un prêt collectif global
La loi dote les copros d’un nouvel outil de financement. Les syndicats de copropriétaires pourront à l’avenir souscrire un prêt global collectif pour financer des réparations, des travaux d’amélioration ou d’entretien des immeubles. Y compris dans les copropriétés dégradées: elles pourront recourir à ce prêt en s’appuyant sur un fonds de garantie publique.
Plus souple dans ses conditions d’octroi, plus simple aussi, son remboursement fonctionnera comme les charges courantes, réparties entre les différents copropriétaires. Adossé au lot, ce prêt sera donc transmissible en cas de vente. Un copropriétaire peut bien sûr refuser de participer à ce prêt collectif, mais il devra alors verser sa quote-part dans les six mois.
Permis de louer élargi
Le permis de louer pour lequel les diagnostics sont indispensables, gagne du terrain puisque la loi le rend possible même en l’absence de programme local de l’habitat. Ce permis de louer est aussi assorti désormais de sanctions. Dans le cadre de l’instruction du permis, l’intercommunalité ou la commune pourra faire visiter le logement et infliger des amendes en cas de mise en location sans déclaration ou autorisation préalable.
Rénovation par lot
Dans une copropriétaire, tout le monde n’a pas le même intérêt à effectuer des travaux de rénovation énergétique. La loi permet désormais aux copropriétaires d’effectuer, à leurs frais, des travaux d’isolation thermique de la toiture ou du plancher qui affectent les parties communes de l’immeuble. Par exemple pour le copropriétaire directement situé sous les toits, dont l’appartement sera moins bien classé. La loi pose toutefois quelques conditions: les travaux ne doivent pas affecter ni la structure de l’immeuble, ni ses équipements ni la jouissance des parties privatives d’autres copropriétaires. Ces travaux ne doivent pas non plus être déjà programmés dans le cadre d’un Plan pluriannuel de travaux.
Enfin, même si ces travaux sont pris en charge par un ou plusieurs copropriétaires, leur réalisation doit être votée à la majorité des voix des copropriétaires.
Expropriation facilitée
Plusieurs mesures facilitent l’intervention publique dans les immeubles dégradés. Dans les constructions qui présentent un danger pour la sécurité et la santé des occupants, le maire aura désormais la possibilité de faire réaliser des travaux aux frais du propriétaire, lorsque la mise en demeure reste sans effet.
Dans le cas où aucuns travaux ne sont menés, l’expropriation peut intervenir avant même que les dommages à l’immeuble ne soient irréversibles. Cette procédure concernera les propriétaires de logements frappés par au moins deux arrêtés de péril ou d’insalubrité au cours des dix dernières années lorsque les prescriptions de ces arrêtés n’ont pas été totalement exécutées.
La loi Alur de 2014 avait également introduit une expérimentation avec la possibilité d’exproprier les seules parties communes d’un immeuble en état de carence. Cette expérimentation est prolongée de dix ans.
Une meilleure information
La nouvelle loi renforce l’information des copropriétaires sur l’état de la copropriété. Le syndic est ainsi tenu d’informer les copropriétaires et les occupants sur l’existence d’une procédure d’insalubrité. Le fonctionnement est aussi fluidifié avec la numérisation des notifications et mises en demeure transmises par le syndic. La loi facilite aussi le vote en assemblée générale pour les travaux de rénovation énergétique.
Plusieurs informations sont également ajoutées au registre national des copropriétés : sur la situation financière de la copropriété, sur les caractéristiques techniques de l’immeuble issues des diagnostics obligatoires, sur les refus d’autorisation préalable de mise en location…
Bail à réhabilitation
L’expérimentation est prévue pour cinq ans. Avec l’autorisation des préfets, les propriétaires sous le coup d’un d’arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, pourront conclure un « bail à réhabilitation ». Avec cette procédure, le preneur (qui peut être une collectivité territoriale) récupère le logement pour un temps déterminé afin de réaliser des travaux de remise en état, avec possibilité ensuite de le louer à des locataires.
Sanctions renforcées pour les marchands de sommeil
Les sanctions sont renforcées à l’encontre des marchands de sommeil : jusqu’à sept ans d’emprisonnement et 200.000 euros d’amende, en cas de circonstances aggravantes. L’interdiction d’acheter des biens pour les marchands de sommeil est également allongée, portée à 15 ans (contre 10 aujourd’hui).
De même, les sanctions sont durcies pour le bailleur qui refuse d’établir un bail et de délivrer un reçu ou quittance de loyer : jusqu’à un an d’emprisonnement et 20.000 euros d’amende.
Dispositif Denormandie étendu jusque 2027
Dans certaines zones, les particuliers bénéficient d’une réduction d’impôt lorsqu’ils achètent un logement à rénover avant de le mettre en location. C’est le dispositif Denormandie, en place depuis 2019. L’aide fiscale ne s’adressait qu’aux biens achetés jusque fin 2026; la loi accorde un an supplémentaire, jusque fin 2027.
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