Le diagnostiqueur a sans doute cru bien faire en allant plus loin que la réglementation de l’époque. Dans son rapport avant-vente de 2011, il évoque une toiture en amiante, élément qui n’apparaitra dans son programme de repérage que deux ans plus tard. Problème, il a signalé des ardoises sur le bâtiment annexe, mais il n’a pas repéré celles du bâtiment principal. Le diagnostiqueur peut aller plus loin que sa mission, mais il ne doit rien oublier.
Où s’arrête la mission du diagnostiqueur ? Dans le cadre d’une vente, la recherche d’amiante ne prétend pas à l’exhaustivité et se limite aux listes de matériaux A et B énoncées par le Code de Santé publique. Nous sommes en 2011, les toitures (comme les bardages, les façades légères ou les conduits) ne figurent pas encore dans le programme de repérage du constat vente. Sur cette mission dans l’Ouest, le diagnostiqueur a pourtant signalé dans son rapport des ardoises composites amiantées sur le bâtiment annexe.
En dehors du programme de repérage
Malheureusement, son diagnostic ne dit pas que le même type d’ardoise se retrouve aussi sur la toiture du bâtiment principal. Les propriétaires y voient une faute, ils saisissent la justice réclamant la prise en charge du désamiantage.
En appel, le diagnostiqueur expliquera que la couverture de l’annexe était en effet « visible à hauteur d’homme et accessible depuis l’intérieur alors que l’accès aux matériaux de couverture depuis l’intérieur de la maison principale était impossible en raison de l’existence de plaquages et de rampants ». L’expert judiciaire n’est cependant pas du même avis : il estime que la couverture était directement visible à partir du jardin ou de la rue. De plus, la décoloration sur les fausses ardoises auraient dû mettre la puce à l’oreille d’un opérateur, missionné et formé à la recherche d’amiante.
Que les toitures, à l’époque, ne relèvent pas du champ de repérage ne change rien. La liste de matériaux et produits à rechercher dans le cadre d’une vente ne peut être considérée comme limitative selon les propriétaires : le diagnostiqueur s’il a connaissance d’autres matériaux, doit les repérer également en vertu de l’arrêté du 22 août 2002. Son rapport se révèle donc incomplet. Et puisqu’il existe un lien de causalité entre l’omission fautive de la société de diagnostic et ils réclament l’indemnisation de leur préjudice constitué par le surcoût engendré par les travaux de désamiantage.
Le désamiantage pour le diagnostiqueur
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel. En ne mentionnant qu’une seule des deux parties amiantées, le diagnostiqueur a bel et bien commis une faute. Même si ces éléments n’entraient pas dans son champ de mission, l’opérateur mentionne l’inspection des toitures dans son rapport, en contradiction d’ailleurs avec la mention selon laquelle les couvertures ne faisaient pas partie des points de contrôle systématique. « Le diagnostiqueur, qui avait pris l’initiative d’un contrôle portant sur des éléments ne figurant pas dans la liste des points de contrôle obligatoire, devait, en application de l’annexe I de l’arrêté du 22 août 2002, signaler la présence d’amiante au niveau de la couverture du bâtiment principal, comme il l’avait fait pour celle de l’annexe, dont la composition était similaire, dès lors qu’il avait connaissance de la présence d’amiante en cet endroit. »
Puisqu’il s’agit d’un élément hors du programme de repérage, le diagnostiqueur tente d’échapper à la réparation intégrale du préjudice estimant que le surcoût des travaux de désamiantage ne peut lui être imputé. En vain. La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel de Rennes: le diagnostiqueur prendra donc en charge le désamiantage de la toiture du bâtiment principal, pour un coût de 16.500 euros.
Cour de cassation, troisième chambre civile, 21 décembre 2023, pourvoi n° 22-19.369.
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