Inondations : le vendeur ne peut pas toujours se contenter de l’état des risques

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Surtout ne rien cacher aux acquéreurs, et ça vaut dès la promesse de vente. Après la signature du compromis, les acheteurs apprennent que leur bien a été victime d’une inondation et cassent la vente de la maison. L’état des risques était pourtant renseigné comme il se doit, mais ce n’était pas suffisant : la vendeuse aurait dû attirer l’attention sur ce risque essentiel.

Bien sûr, il existe un état des risques et pollutions (ERP) qui renseigne les acquéreurs et locataires sur l’exposition du bien à différents risques. Rien à redire, lors de la promesse de vente en 2022, le document était annexé, correctement renseigné. Pourtant, quelques semaines après avoir signé le compromis, les acquéreurs refusent de passer devant le notaire. Entre temps, ils ont appris que la maison convoitée se situait dans une zone de ruissellement.

La machine judiciaire se met en marche, la vendeuse réclame quelque 18.000 euros au titre de la clause pénale prévue à l’acte. A ses yeux, les acquéreurs étaient parfaitement informés puisque que l’état des risques leur a été fourni au moment du compromis. Selon le document, si le territoire n’est pas soumis à un risque d’inondation important, il entre cependant dans le cadre d’un programme d’action de prévention des inondations (PAPI) et il est exposé à des remontées de nappes.

Pour les acquéreurs, la vente est nulle puisqu’ils ont été trompés par la venderesse qui leur a sciemment caché que l’immeuble était situé dans une zone inondable et qu’elle avait connu une inondation en juillet 2021. La vendeuse avait notamment alerté la mairie de la commune d’un effondrement sous le pignon droit de sa maison à la suite de ruissellements ou de coulées de boue.

Une information essentielle… mais pas claire

La cour d’appel d’Amiens va dans le sens des acquéreurs. « Le caractère inondable d’une propriété à partir d’un certain seuil de gravité doit être tenu pour une caractéristique déterminante du consentement de celui ou de ceux qui en font l’acquisition », explique-t-elle. « Le risque n’est donc pas faible. Il méritait d’être signalé aux acquéreurs. »

La vendeuse ne pouvait donc se contenter de l’état des risques et pollutions (ERP). Que celui-ci mentionne la présence d’un AZI (Atlas des zones inondables) et d’un PAPI sans plus informations sur l’exposition du bien ainsi que des « Zones potentiellement sujettes aux inondations de caves fiabilité moyenne (dans un rayon de 500 mètres) » n’y change rien. Aussi essentielles soient ces informations, elles n’apparaissent pas très claires. « Ces expressions techniques sont totalement obscures pour un acquéreur profane, relève la cour d’appel. Elles ne peuvent remplacer une mention ou un propos explicite. En outre, le document est inséré dans un bloc d’une centaine de pages comportant 12 documents techniques (DPE, diagnostic électricité, etc.) et rien ne vient attirer l’attention des acquéreurs sur sa portée concrète. »

La vendeuse aurait donc dû attirer l’attention des acheteurs sur le risque d’inondation par ruissellement. Ce qu’elle n’a pas fait. « L’omission intentionnelle de cette information est une réticence dolosive qui entraîne l’annulation de la promesse synallagmatique de vente. » La vendeuse est donc déboutée, elle ne peut réclamer le montant de la clause pénale et elle devra au contraire verser 4.500 euros à la partie adverse pour leurs dépenses de justice.

Cour d’appel d’Amiens, 8 octobre 2024, RG n° 23/02681.

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