Amiante : la trappe se referme sur le diagnostiqueur

Regard Beton

Où s’arrête le repérage amiante en cas de vente ? La réglementation définit des limites, mais sur le terrain, celles-ci ne sont pas toujours aussi claires que sur le papier. Dans cette histoire, le diagnostiqueur est poursuivi pour ne pas avoir repéré l’amiante d’une canalisation dans un fourreau accessible par un regard. Mais même en soulevant la trappe, pouvait-il le voir ?

Classique. Le diagnostic réalisé lors de la vente en 2018 concluait à l’absence d’amiante. Mais quelque temps plus tard, à la faveur de travaux de réhabilitation, les acquéreurs découvriront un conduit de chauffage amianté dans l’entrée de l’immeuble. La facture n’est plus tout à fait la même, un repérage avant-travaux puis un désamiantage devront être réalisés pour un coût global de 11.000 euros. La machine judiciaire se met en branle, pour les acquéreurs, l’opérateur a forcément mal fait le boulot.

Ce n’est pas si simple. Le particulier oublie souvent que le repérage amiante avant-vente n’a rien d’exhaustif et qu’il se borne uniquement à deux listes de matériaux (listes A et B du Code de santé publique) et à une recherche non destructive. Ses moyens d’investigation restent limités, l’opérateur ne peut pas non plus deviner où se cache l’amiante.

Enfoui dans le sol, mais accessible par un regard

Dans cette histoire, l’amiante se présente au niveau d’un fourreau par lequel circulaient les conduites de chauffage. Le matériau entre bien dans le champ de repérage du diagnostiqueur avant une vente. Reste à savoir si celui-ci pouvait être vu. « Enfoui sous le sol de l’habitation », il était cependant « accessible par un regard situé dans l’entrée ». Problème, l’opérateur n’a pas ouvert ce regard constitué d’une trappe en béton alors que celle-ci pouvait être manipulée sans opération destructrice.

En première instance, les acquéreurs avaient d’abord eu gain de cause et obtenu près de 13.000 euros de dommages et intérêts. Revirement en cour d’appel, la faute du diagnostiqueur n’est pas établie. Après tout, rien ne dit que la simple ouverture de la trappe permettait de repérer l’amiante. D’autant que les acquéreurs n’ont versé aucune pièce permettant de déterminer précisément dans quels matériaux se trouvait l’amiante et où ceux-ci étaient localisés.

« Si la trappe ouvrant un regard sur les canalisations peut être manipulée sans dommage, il n’est cependant pas possible, en l’état des éléments produits, de déterminer avec précision dans quels matériaux se trouve l’amiante ni où il est localisé », retiendra la cour d’appel de Nancy en 2022. Autrement dit, pour repérer cet amiante, des sondages destructifs étaient peut-être nécessaires et là, on sort de la mission du diagnostiqueur dans un contexte de vente.

La Cour de cassation vient toutefois de casser l’arrêt. « La manipulation sans dommage de la trappe dans l’entrée de l’immeuble autorisait un regard sur le fourreau de conduites de chauffage, c’est-à-dire une vérification visuelle, sans travaux destructifs, d’un matériau mentionné dans la liste B, ce qui aurait dû conduire le diagnostiqueur, en cas de doute, à réaliser des prélèvements pour analyse. » Retour à case départ, les deux parties sont donc renvoyées en appel pour y être à nouveau jugées.

Cour d’appel de Nancy, 14 novembre 2022, n° 21/02686.

Cour de cassation, 3e chambre civile, 30 janvier 2025, Pourvoi n° 23-14.069.

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