DPE erroné : les acquéreurs indemnisés de leur surconsommation électrique

La maison était classée en B, mais c’est parce que le DPE se montrait bien trop généreux. L’expertise conclura à du D « limite E » pour ce pavillon de la région parisienne. Pour les anciens diagnostics réalisés avant juillet 2021, la jurisprudence limite souvent la condamnation à la perte de chance. Pourtant, dans cette affaire, les acquéreurs obtiennent également l’indemnisation de leur surconsommation électrique.

A vendre maison « plutôt esprit écolo avec matériaux permettant de vraies économies d’énergie (électricité et eau) », disait l’annonce. Effectivement, avec une consommation énergétique de (seulement) 87.5 kWh/m²/an, et une étiquette DPE en B, cette maison tout-électrique semblait vertueuse. Pourtant les acquéreurs vont vite déchanter : leurs consommations n’ont rien à voir avec celles annoncées.

Nous sommes en 2013, et pour réaliser son diagnostic, l’opérateur a utilisé la méthode sur relevés : en clair, le diagnostiqueur a déterminé la consommation énergétique du bien d’après les factures remises par le client. Or, celles-ci se révèlent « d’un montant anormalement faible » selon l’expert judiciaire. « Les factures d’énergie électrique communiquées par (le vendeur) et EDF à l’expert font apparaître des anomalies stupéfiantes de consommations exceptionnellement faibles. »

Vendue en B la maison se révèle classée en D

Le diagnostiqueur a commis plusieurs fautes, à commencer par le choix de la méthode de calcul. Puisque la maison a été construite après 1948, il devait utiliser la méthode 3CL. « Il aurait dû effectuer les calculs de déperditions calorifiques selon la méthode conventionnelle pour réaliser le DPE du bien compte tenu de sa date de construction », relève la cour d’appel s’appuyant sur le rapport d’expert. Effectivement, le résultat n’est plus du tout le même : cinq autres DPE réalisés cette fois selon la bonne méthode aboutissent à un classement en D « limite E ».

Le diagnostiqueur ne s’est pas seulement trompé dans la méthode, il a aussi failli à son devoir de conseil. « La faiblesse des consommations indiquées dans les factures présentées par les vendeurs aurait dû conduire la société X à insister pour obtenir toutes les données lui permettant d’établir son diagnostic en conformité avec les dispositions réglementaires, et éventuellement à alerter son mandant sur leur caractère anormal. »

Pour la cour d’appel, aucun doute, sans ces erreurs, les acquéreurs « auraient eu des chances importantes de pouvoir négocier une réduction du prix de vente et ainsi acquérir à des conditions plus avantageuses ». D’autant que la qualité énergétique de la maison était « une qualité essentielle du bien déterminante du consentement des acquéreurs ». Conformément à la jurisprudence, le diagnostiqueur est donc condamné à les indemniser pour la perte de chance de n’avoir pu négocier le bien à un prix plus avantageux. Le diagnostiqueur et son assureur devront donc verser 36.000 euros, soit 7,5% du prix de vente du bien.

20.000 euros de surconsommation électrique

Les vendeurs ont beau se réfugier derrière le diagnostiqueur, ils n’échappent pas non plus à une condamnation. La faiblesse des consommations électriques affichées dans les factures transmises au diagnostiqueur s’explique en effet par un dysfonctionnement du compteur que le vendeur, électricien de métier, ne pouvait ignorer. Autrement dit, les vendeurs savaient que la consommation énergétique était en réalité bien plus élevée que celle annoncée.

« Il est parfaitement établi que la chose convenue entre les parties était un logement présentant un niveau de performance énergétique élevé et ne nécessitant qu’un modique budget de dépenses d’électricité, alors que la chose délivrée par les vendeurs se révèle être un bien dont le niveau de consommation énergétique est dans la moyenne avec un budget beaucoup plus important que celui qui était prévisible au regard des factures fournies par les (vendeurs). »

Au titre de leur manquement à leur obligation de délivrance conforme, les vendeurs doivent donc indemniser les acquéreurs de leur surconsommation électrique depuis 2013. Soit près de 20.000 euros, auxquels s’ajoutent les frais d’expertise (6.000 euros) et le préjudice moral (5.000 euros).

L’affaire montre combien un DPE un peu trop complaisant est une véritable bombe à retardement. Douze ans après la vente, le diagnostiqueur et les vendeurs payent ainsi les pots cassés d’un diagnostic erroné avec au total près de 70.000 euros de condamnation.

Cour d’appel de Paris, 21 février 2025, RG n° 22/19288.

1 Commentaire

  1. D’où l’intérêt du vendeur d’une part :
    1/ De transmettre tous les documents qui lui sont demandés
    2/ De bien choisir son diagnostiqueurs qui dans ce cas à utilisé une méthode pourtant interdite, ce choix ayant concurrent à donner une “fausse” information à l’acquéreur mais ce qui a également amené celui-ci à mettre en cause in solidum le vendeur et le diagnostiqueur !

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