Le parc social est confronté à un rude défi. Selon un rapport de l’Ancols (Agence nationale de contrôle du logement social) sorti au début de l’été, moins de 7% du parc social a déjà fait l’objet d’une rénovation thermique. Le rythme s’accélère, mais il faudra mettre les bouchées doubles car un logement sur dix reste aujourd’hui une passoire énergétique qui risque d’être privée de location.
L’effort est colossal. Entre 2016 et 2020, 520.000 logements ont fait l’objet d’une rénovation thermique dont 340.000 avec des travaux finalisés au 31 décembre 2021. Mine de rien, cela représente plus d’un logement sur dix dans le parc social. Et le rythme s’accélère, selon l’Ancols : 80.000 logements voient leur performance énergétique s’améliorer chaque année depuis 2018, c’est deux fois plus qu’en 2016. C’est bien, mieux que dans le logement privé, mais le logement social devra faire encore mieux. Quantitativement, et qualitativement.
Car le gain de performance énergétique n’est pas toujours à la hauteur des ambitions. “Le résultat des travaux menés conduit à un saut d’1,5 étiquette de DPE en moyenne”, expliquent les auteurs du rapport. Autrement dit, les rénovations ne sont pas forcément réellement performantes. Dans 6% des travaux, l’étiquette DPE est même restée identique. En fait, moins d’un quart des logements rénovés (22%) décrochent un niveau BBC. Insuffisant si le logement social veut respecter les objectifs de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC). “Pour les atteindre, 90 à 135.000 logements devraient être rénovés chaque année dont plus de 90% avec un DPE A ou B après travaux.”
L’amiante, frein à la rénovation
Moralité, il faut rénover plus et mieux aussi. Mais l’Ancols relève cependant de sérieux freins. Le financement des travaux apparaît en tête de liste. La rénovation coûte cher, dans les dernières opérations livrées, les travaux ont été estimés à 35.000 euros en moyenne par logement dont 15.000 euros pour la partie thermique. Au total, entre 2016 et 2020, le parc social a englouti quelque 9 milliards d’euros dans la rénovation de son bâti, dont 4,1 milliards pour le volet thermique. Et ce n’est pas fini. Deux tiers des bailleurs ont d’ores et déjà prévu d’accroître leurs investissements dans la rénovation thermique de leur parc au cours des trois prochaines années.
Le frein n’est pas seulement financier, il est aussi technique. Plus d’un bailleur sur dix évoque ainsi l’amiante qui vient contrarier les travaux et alourdir, parfois très significativement, la facture. Les auteurs de l’étude identifient ainsi des “difficultés corrélées au nombre de travaux à réaliser et la présence d’amiante”. Autrement dit, plus on veut une rénovation performante, plus on agit sur les différents postes et plus l’amiante a des chances de contrarier l’opération. “32% des bailleurs déclarent avoir rencontré des difficultés assez ou très importantes en cas de présence d’amiante.”
460.000 logements sociaux en sursis
Il y a cependant urgence. Car même si le parc social est plutôt bien loti avec quasiment deux fois moins de passoires énergétiques que dans le parc privé, leur nombre est loin d’être négligeable. Le nouveau DPE est aussi passé par là, quand avec l’ancienne méthodologie le parc social ne comptait “que” 7% de passoires, il en affiche désormais 9,5%. Autant de dizaines de milliers de logements supplémentaires qu’il faudra bien rénover aussi avant que les logements classés F et G ne soient interdits de location. Dès fin 2021, la présidente de l’USH (Union sociale de l’habitat) Emmanuelle Cosse alertait déjà sur ce besoin de financement supplémentaire.
Au total, si on considère les récents chiffres du ministère, au 1er janvier 2022, le parc social comptait quelque 460.000 passoires énergétiques (en F ou G) dont 50.000 dites “très énergivores” et menacées d’être bannies du marché locatif à très court terme, dès le 1er janvier 2023.
Rapport de l’Ancols, Agence nationale de contrôle du logement social.
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