Alors que le Projet de loi de finances 2024 est actuellement examiné, Christophe Béchu a dissipé toute inquiétude au cours de son audition devant la commission du développement durable à l’Assemblée nationale. Promis, personne ne sera mis dehors malgré la prochaine interdiction de location des passoires en G. Le ministre de la Transition écologique refuse d’“opposer la crise du logement à l’urgence climatique”.
1er janvier 2025, les logements avec un DPE en G ne seront plus conformes aux règles de la décence énergétique, et par ricochet ne pourront plus être loués. C’est écrit. Mais gare aux raccourcis qui laisseraient à une hémorragie dans l’offre locative.
D’abord, la plupart des passoires thermiques ne se trouve pas dans le parc locatif. “Les passoires thermiques sont deux fois plus nombreuses dans les logements vacants”, pour le ministre auditionné la semaine passée, par la commission du développement durable. Vrai. La preuve par les chiffres: la France compte plus de 7 millions de logements en F ou G, mais deux millions sont des résidences secondaires ou sont vacants. Reste quand même quelque 5,2 millions de résidences principales en F et G, mais deux millions dans le parc locatif, dont 600.000 environ en G.
Les passoires sorties du parc locatif? Fake news !
Plus de 600.000 passoires, on voit quand mal comment le marché du locatif déjà hyper tendu pourrait aujourd’hui s’en passer. Christophe Béchu balaye ce qu’il appelle des “fake news” : “le 1er janvier 2025, on ne sortira aucun locataire. Personne n’a dit ça.” “Je ne veux pas qu’on attaque le calendrier des passoires thermiques en laissant penser qu’une sortie massive des locations se prépare.”
Le ministre prend en exemple, les quelque 150.000 logements classés G+, les pires passoires thermiques, déjà ciblés par la réglementation depuis le 1er janvier 2023. “Où sont les sorties des G+? S’il y avait une bombe à venir, on devrait déjà l’avoir constatée avec ces 150.000 logements insalubres.” A une différence près toutefois, le cadre réglementaire n’est pas tout à fait le même.
Rien n’interdit aujourd’hui un propriétaire d’un logement en G+ de continuer à louer son bien, mais si son locataire s’en va, il ne pourra pas le remettre sur le marché sans travaux. L’interdiction de louer une passoire en G est un peu différente: elle entrera en vigueur dès 2025, quoiqu’il arrive sans qu’il y ait forcément un changement de locataire.
“Le geste le plus simple, c’est de passer de G à F”
Le gouvernement multiplie donc les efforts pour repêcher ces logements énergivores. Comme l’avait déjà annoncé le ministre du Logement, Patrice Vergriete, Christophe Béchu plaide pour des petits travaux peu coûteux mais qui permettraient de décrocher une classe F, et arracher du même coup un sursis de trois ans. “Le geste le plus simple, c’est de passer de G à F. Même si l’objectif est de favoriser, de façon très claire, les rénovations performantes, nous allons valoriser le geste qui permet de passer de G à F en montrant le peu qu’il en coûte.” Côté gouvernement, on espère ainsi sauver un tas de passoires promises demain à l’indécence énergétique, et “sécuriser” les propriétaires qui veulent continuer à louer.
L’enjeu est aussi là, “sécuriser” les propriétaires des passoires en G. Car s’il est peu probable qu’un bailleur mette son locataire dehors au 1er janvier 2025 sous prétexte que le logement ne répond plus aux canons de la décence, en revanche des locataires pourraient être tentés de saisir la justice pour réclamer une diminution ou une restitution de loyer. Après tout, leur bailleur leur aura loué un logement non décent. En pratique, ça risque de prendre un peu de temps avant que ne tombent les premières condamnations liées au non-respect de la loi, et que des propriétaires bailleurs soient sommés par la justice de réaliser des travaux.
D’ailleurs, faute de sanction automatique et puisque le locataire devra passer par la case justice, il y a fort à parier que de nombreux logements en G continueront à être loués après le 1er janvier 2025. Sans doute pour un bout de temps encore quand on sait que de nombreux locataires ignorent la performance énergétique de leur logement, et que dans les locations de particulier à particulier, le DPE passe parfois à la trappe.
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