Un même bien, deux DPE réalisés à plusieurs années d’intervalle et une sacrée différence de classement. Pour le couple propriétaire de cette maison en Bretagne, c’est clair, le premier diagnostiqueur a forcément commis une erreur. L’affaire n’est pas si simple, et l’arrêt de la cour d’appel de Rennes montre combien il est hasardeux de comparer deux DPE alors que la méthode a beaucoup évolué au fil des années…
Lors de la vente conclue en 2011, le DPE classait la maison en B avec une dépense énergétique annuelle de très exactement 1.031 euros. Quatre fois moins que les frais de chauffage invoqués par les acquéreurs lors du premier hiver passé dans leur nouvelle demeure. Des travaux d’isolation et de remplacement d’huisserie sont réalisés, et en 2015, les propriétaires commandent un second DPE. Surprise, le classement de leur bien s’est dégradé: la maison est désormais classée en D avec une estimation de consommations de 1.658 euros. A n’y rien comprendre…
Estimant que le diagnostiqueur avait commis une faute et s’était montré bien trop généreux en classant le bien en B, les acquéreurs ont saisi la justice. Ce couple de Bretons réclamait plus de 17.000 euros pour des travaux d’isolation, 11.000 euros de dommages et intérêts pour le trouble de jouissance, et encore 5.000 euros pour le préjudice moral…
Deux DPE ne sont pas forcément comparables
Le tribunal puis la cour d’appel de Rennes ont toutefois rejeté leurs demandes. Motif? Les deux DPE réalisés en 2011 et en 2015 ne pouvaient être comparés ensemble. D’abord parce que la méthode n’est pas la même: 3CL version 15c pour le DPE de 2011, 3CL version 1-3 pour le DPE de 2015. Ajoutons que les surfaces de l’immeuble sont différentes entre les deux diagnostics (97,72 m² en 2011, 115,33 m² en 2015), que les évaluations de coût des énergies ont été réalisées sur des prix moyens différents et que le diagnostic de 2015 tient compte de consommations de chauffage électrique inexistantes quatre ans auparavant, bref, la cour d’appel retient que les deux diagnostics n’ont rien de comparable.
“En l’absence d’expertise et au regard de la différence de méthode, de référentiel et de base de calcul qui font obstacle à toute comparaison utile des diagnostics, le fait que la performance énergétique globale du logement soit estimée moindre en 2015 qu’elle ne l’avait été en 2011, et ce malgré la réalisation de travaux d’isolation, ne saurait suffire à établir que le diagnostic réalisé en 2011 avait mal été réalisé.”
La cour d’appel juge par ailleurs la différence de 627 euros entre les estimations des deux diagnostics peu “significative au regard de l’augmentation constante des prix de l’énergie étant notamment constaté que les bases de prix étaient ceux de l’année 2006 pour le diagnostic réalisé en 2011”.
Cour d’appel de Rennes, 2e chambre, 10 décembre 2021, n° 18/06176.
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