L’heureux propriétaire d’un terrain à bâtir devra-t-il effectuer un repérage amiante avant de lancer des travaux ? Oui, en fait, c’est même déjà le cas. La norme sur le repérage de l’amiante naturel est parue, l’arrêté correspondant doit suivre, mais le repérage s’applique déjà en amont de travaux, au titre de l’évaluation des risques.
Dans la famille des avant-travaux, je demande l’amiante naturel. Inconnu au bataillon, ou presque. Reconnaissons-le, l’obligation passe souvent à la trappe. Hormis peut-être du côté de la Haute-Corse où, forcément, le rapport à l’amiante environnemental est un peu différent.
Vincent Périn, directeur opérationnel du bureau GDA qui a fait de l’amiante naturel sa spécialité, le reconnaît volontiers, “la grande majorité des maîtres d’ouvrage ignore aujourd’hui cette obligation“. Méconnaissance bien sûr, absence de contrôles, mais aussi pauvreté de la littérature officielle dédiée au sujet.
Même pour une maison individuelle
La norme définissant une méthodologie de repérage est sortie, on attend désormais l’arrêté correspondant, vraisemblablement courant 2022. Mais même non encadré réglementairement, le repérage est d’ores et déjà exigé avant tous travaux au titre de l’évaluation des risques. En clair, toute société intervenant sur un terrain nu doit veiller à ne pas exposer ses salariés au risque amiante.
Tous travaux, on a dit. Avant du terrassement, avant une opération de viabilisation, avant de creuser des fondations… “A partir du moment où le sol n’a jamais été remanié, ce qui exclut quasi systématiquement les sols en ville, le repérage est exigé dès qu’on intervient dessus”, résume Vincent Périn. “Sans limitation de volume ou de profondeur.” Peu importe que le terrain soit destiné à la construction d’une maison individuelle, d’une zone d’activité de plusieurs hectares, ou d’une voirie. Tous les sols sont concernés. Peu importe aussi que le donneur d’ordre soit un particulier, une collectivité ou une entreprise.
Quelques départements devraient cependant échapper à ce repérage obligatoire. “On sait que dans les bassins sédimentaires comme le bassin parisien ou les Hauts-de-France, il est impossible de trouver des roches amiantifères à la différence des massifs comme les Alpes, le Massif armoricain, les Pyrénées, le Massif central…” La liste des départements exemptés de cet avant-travaux a finalement été retirée de la norme, mais elle devrait logiquement réapparaître dans le futur arrêté.
Une formalité dans la plupart des cas
Une obligation supplémentaire, encore des coûts. D’autant que la mission réclame des compétences singulières, puisqu’elle est destinée à des « géologues opérateurs de repérage » et non aux diagnostiqueurs immobiliers. “Il faut bien comprendre qu’avec l’amiante naturel, nous ne sommes plus sur du repérage classique. En fait, selon la norme, le géologue opérateur devra d’abord effectuer une étude documentaire appelée A0, et s’il se rend compte qu’une formation géologique pose problème, il devra se rendre sur place pour réaliser une cartographie et éventuellement effectuer des prélèvements.“
En pratique, l’étude documentaire devrait souvent permettre de lever tout soupçon et d’écarter le risque amiante, sans déplacer un géologue, sans réaliser des prélèvements ou analyses. Sauf dans certains massifs, comme la Haute-Corse, évidemment. “Dans la majorité des cas, nous nous arrêterons à l’étude A0 et ce repérage s’apparentera à une formalité“, estime Vincent Périn. Un peu comme l’état des risques et des pollutions (ERP) qui a d’ailleurs inspiré le bureau GDA pour bâtir une solution en ligne.
“Nous avons développé une solution ergonomique, GDA0, pour permettre au donneur d’ordre d’obtenir son repérage sous trois jours et à des prix raisonnables. A partir d’informations renseignées directement en ligne, un géologue effectuera l’étude documentaire sur la zone du projet.” De quoi peut-être mieux faire passer la pilule pour cette obligation qui même si elle n’a finalement rien de nouveau, risque d’être mal vécue.
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