Rénover ou reconstruire ? La question n’est pas taboue

Démolir ou rénover ? That’s the question. Pour le moment, la rénovation est réputée moins coûteuse et affiche un bilan carbone bien plus favorable. Mais ce n’est pas toujours aussi évident. Et ce sera peut-être moins évident encore demain avec les nouveaux seuils d’émissions carbone qui s’imposeront à la RE2020. Des acteurs de l’immobilier se sont penchés sur le sujet afin de comparer le bilan carbone d’une rénovation à celui d’une démolition-reconstruction.

La rénovation plutôt que la démolition-reconstruction, d’abord parce que ça coûte moins cher. Oui, mais plus on avance, plus la rénovation embarque de nouvelles exigences. On ne se soucie plus seulement de l’isolation ou du changement de mode de chauffage, le confort d’été et la qualité de l’air intérieur, par exemple, occupent une place de plus en plus importante. Tant mieux. La rénovation apparaît de plus en plus lourde.

Ce n’est pas fini. Car la rénovation énergétique semble aujourd’hui rattrapée aussi par le risque climatique. Question de bon sens : pourquoi rénover une maison exposée à des risques naturels, inondations ou mouvements d’argile ? L’IFPEB (Institut Français pour la performance du bâtiment) suggérait le mois dernier de glisser une dose de résilience dans le DPE, tandis que des sénateurs demandaient en mai d’embarquer la résilience dans la rénovation énergétique. Que MaPrimeRénov’ soit aussi conditionnée par la vulnérabilité des biens aux risques naturels.

Oui, la facture de la rénovation risque de s’alourdir encore avec ses exigences supplémentaires. A se demander finalement s’il ne vaudrait pas mieux démolir et reconstruire aux standards actuels. On n’y est pas encore : si la rénovation est privilégiée, ce n’est pas juste une question de coûts, c’est aussi une question de bilan carbone.

La rénovation plus vertueuse, mais sous conditions

Doit-on préserver l’existant à tout prix ou démolir reconstruire sur la même parcelle ? 90 acteurs immobiliers, des maîtres d’ouvrage et des maîtres d’œuvre, regroupés dans le Hub des prescripteurs bas carbone porté par l’IFPEB, ont planché sur le sujet à partir de cas concrets d’immeubles de bureaux et de logements. Effectivement, une rénovation lourde d’un bâti existant reste bien plus vertueuse pour la décarbonation qu’une démolition-reconstruction neuve aux standards actuels. 30% de moins environ, estime le Hub des prescripteurs bas-carbone.

Mais pour se révéler réellement intéressante, la rénovation énergétique doit cependant réunir trois conditions : une réduction drastique des consommations qui doit être à minima de 40%, une sortie totale des énergies fossiles et la préservation au maximum de l’existant. « Lorsque ces conditions ne peuvent pas être réunies, le bilan carbone de la rénovation peut alors être comparable voire supérieur à la démolition reconstruction », expliquent les auteurs de l’étude. De quoi nourrir la réflexion. Et c’est d’autant plus vrai pour certains bâtiments anciens voire patrimoniaux avec des hauteurs sous plafonds élevées ou une compacité importante.  

Qu’une rénovation ait un bilan carbone plus avantageux que la démolition reconstruction ne doit donc pas être accepté comme une assertion. Même si la rénovation reste souvent le premier scénario privilégié, rien ne dit qu’elle le restera à l’avenir. Car la RE2020 avec des nouveaux seuils d’émissions carbone programmés en 2025, 2028 et 2031 risque de rendre le bilan carbone de la démolition reconstruction plus favorable. Le Hub réclame donc un cadre incitatif d’exemplarité carbone de la rénovation, à l’image de ce qui existe pour la RE2020, afin de passer d’une rénovation thermique à une rénovation bas-carbone. Et lorsque les trois conditions qui permettent une rénovation bas-carbone ne sont pas réunies, la démolition-reconstruction ne doit plus rester un taboue. Il existe peut-être d’autres alternatives à étudier que la rénovation à tout prix.

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