C’est une autre inconnue dans l’équation de la rénovation énergétique. Pour permettre une rénovation massive du parc, il faudra davantage d’entreprises. Entre 170.000 et 230.000 emplois d’ici 2030 selon un récent rapport de France Stratégie, le service de prospective rattaché à Matignon.
Un défi peut en cacher un autre. Le bâtiment tertiaire ou résidentiel doit réduire drastiquement ses émissions de gaz à effet de serre. Mais pour y parvenir il aura besoin de main d’œuvre. De beaucoup de main d’œuvre. Les estimations divergent un peu. Le rapport de France Stratégie dévoilé début juillet en retient trois allant de 170.000 à 230.000 emplois nouveaux dans le bâtiment.
Sacré défi pour le bâtiment. Le secteur, déjà en tension, devra donc redoubler d’efforts. A la fois pour se montrer plus attractif, et aussi former rapidement. Quels que soient les métiers. De l’ouvrier à l’architecte, France Stratégie craint des tensions exacerbées. D’autant que ce besoin de main d’œuvre peut parfois se conjuguer avec des forts taux de départs en cours et en fin de carrière.
Bien sûr, tout dépendra de l’évolution du secteur de la construction neuve aujourd’hui en panne. « L’emploi dans la construction de logements neufs peut être estimé aujourd’hui entre 250.000 et 300.000 ETP (Ademe/France Stratégie). Une baisse de la construction de logements neufs de 20% (…) entraînerait une baisse de 50.000 à 60.000 ETP dans le secteur de la construction. Et ne suffirait donc pas à compenser la hausse des besoins dans la rénovation. » Mais les vases communicants sont insuffisants. « La main d’œuvre « potentiellement libérée » par la construction neuve ne sera pas suffisante pour combler les besoins de recrutement à l’horizon 2030, d’autant que ces métiers connaissent déjà aujourd’hui de fortes difficultés de recrutement. »
7% d’entreprises RGE, seulement
La pénurie de main d’œuvre qui s’annonce semble d’autant plus criante selon les territoires. Car les régions où la construction neuve est forte ne sont pas forcément celles qui auront à fournir le plus gros effort en matière de rénovation énergétique. « Le potentiel de réallocation d’emplois liés à la construction neuve vers la rénovation est relativement modéré dans les régions Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est et Hauts de France, aux forts besoins de rénovation », note France Stratégie. À l’inverse, le secteur de la construction neuve apparaît fort sur des territoires d’Aquitaine ou de la Méditerranée. Là où les passoires énergétiques se révèlent souvent moins nombreuses qu’ailleurs.
Avoir les bras, c’est bien, mais encore faut-il qu’ils soient suffisamment qualifiés pour la rénovation énergétique . Autre écueil, déjà soulevé à plusieurs reprises, le manque d’entreprises RGE. Passage pourtant obligé pour bénéficier de MaPrimeRénov’ et autres précieux subsides de l’État. « Trop peu d’entreprises sont en capacité de faire des rénovations performantes. Seulement 7% de ces établissements sont “Reconnu Garant de l’Environnement” (26% des travailleurs couverts), avec une forte hétérogénéité territoriale. »
Une étude avait déjà montré en mars combien les artisans RGE restaient mal répartis sur l’ensemble du territoire. France Stratégie confirme : « Les régions avec le plus faible taux de labellisation sont celles avec les plus gros déficits potentiels de main d’œuvre pour les métiers du bâtiment à horizon 2030 : Ile de France, Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie, Nouvelle-Aquitaine, Provence-Alpes-Côte d’Azur ». Sur le sujet, le gouvernement a déjà annoncé des mesures toutefois. Bruno Le Maire avait indiqué, fin 2022, que le nombre des entreprises RGE serait multiplié par quatre dans les années à venir. Passant de 60.000 à 250.000 entreprises qualifiées.
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