Les établissements scolaires doivent aussi diminuer de 40% dès 2030 leur consommation énergétique par rapport à 2010. Comme n’importe quel autre bâtiment tertiaire. Justement, l’école n’est peut-être pas un bâtiment comme les autres. Sa rénovation doit être exemplaire. La mission d’information du Sénat chargée d’identifier les difficultés rencontrées par les élus locaux dans la rénovation du bâti scolaire a rendu sa copie, les écoles doivent devenir “la vitrine d’une transition écologique réussie”.
Les bonnes idées du passé ont parfois perdu de leur pertinence à l’aune de la transition écologique. Les grandes baies vitrées des années 1980? Louables pour leur luminosité, pas forcément adaptées lors des canicules à répétition. Idem pour les cours d’écoles bitumées qui se transforment en ilots de chaleur.
La rénovation des établissement scolaires ne se résume pas à une question technique, d’isolation ou d’équipements. Pour la mission d’information au Sénat, cette rénovation du bâti scolaire est d’abord “un enjeu d’exemplarité”. Symbolique presque. “L’objectif est aussi que les écoles, collèges et lycées deviennent « les vitrines d’une transition écologique réussie ».” “Les implications pédagogiques de la rénovation des écoles, collèges et lycées doivent être relevées : il est essentiel de former à la sobriété énergétique l’ensemble des élèves et d’y sensibiliser parents et enseignants. Il s’agit de faire de la classe un laboratoire pédagogique de la mise en place de solutions concrètes d’économie d’énergie “, selon le rapport de la mission d’information. L’intention est louable, mais en pratique, la rénovation du bâti scolaire apparaît comme un sérieux casse-tête.
52 milliards d’euros sur dix ans
Six mois de travaux, 80 auditions, la mission d’information fait remonter de nombreux écueils à la surface. La rénovation du bâti scolaire est d’abord un chantier colossal avec plus de 50.000 écoles, collèges et lycées en France, et des communes aux moyens et à l’ingénierie souvent limités. Les maires se retrouvent parfois dans la situation des ménages auxquels on demande de rénover leur logement, démunis face à la complexité technique d’une rénovation, désemparés dans le maquis des dispositifs de financements.
“L’estimation du prix de ces investissements peut être comprise entre 300 euros et 1.700 euros au mètre carré (entre 1.100 euros et 1.700 euros afin d’atteindre les objectifs du décret tertiaire pour 2040 et 2050).” À l’échelle nationale, la mission d’information évalue le coût annuel à 5,2 milliards d’euros, 52 milliards d’euros sur dix ans, mais “pour la rénovation énergétique des seules écoles publiques”. Sans tenir compte des collèges ou des lycées publics, les écoles publiques représenteraient déjà plus de la moitié de la facture (100 milliards d’euros selon l’Ademe) des collectivités pour rénover leur parc et répondre aux exigences du décret tertiaire.
La rénovation des écoles coûte cher. Plus qu’ailleurs sans doute, elle ne peut se résumer à une isolation thermique renforcée ou la substitution d’un moyen de chauffage performant à une chaudière vieillissante. La ventilation, dans des classes qui accueillent 25 ou 30 élèves au quotidien, est essentielle. “L’isolation thermique peut affecter la qualité de la ventilation, la ventilation peut entraîner une hausse des consommations énergétiques”, souligne le rapport.
Autre difficulté, l’école généralement placée au cœur du quartier ou du village, doit concilier souvent avec des contraintes patrimoniales. Enfin, le plomb et surtout l’amiante présent dans l’école (c’est souvent le cas pour une bonne partie des établissements construits avant 1997), pèsent aussi lourdement sur la facture. “Le coût de deux opérations de même nature et de même niveau peut varier du simple au double selon l’état initial du bâtiment, les matières utilisées et la nécessité de travaux liés à la présence d’amiante ou de plomb”, poursuit le rapport, reprenant une étude Inet-CNFPT de mars 2023.
Meilleure information, meilleur accès aux financements
Pour lever ces écueils, la mission d’information adresse plusieurs recommandations. D’abord, il faut permettre à tous les élus d’accéder à l’ingénierie, ce qui passe “une information simple et complète”. “Or l’information des élus reste aujourd’hui dispersée, de qualité inégale et parfois dépassée.” Pour y remédier, la mission d’information préconise le lancement d’une “plateforme regroupant toutes les informations utiles à l’élaboration et à la conduite des projets de rénovation des bâtiments scolaires” et d’une “conférences des acteurs locaux de l’ingénierie”, chaque année dans les départements.
Plusieurs recommandations souhaitent aussi faciliter l’accès des collectivités territoriales aux financements existants : abaissement du reste à charge, prise en compte des travaux préalables effectués par les collectivités dans l’attribution des subventions, interlocuteur unique pour aider les collectivités territoriales à mobiliser les financements…
Autre piste, la mission d’information propose de dépasser la simple rénovation énergétique. Après tout, la transition écologique ne se résume pas à une baisse des consommations et à la décarbonation. Le rapport suggère ainsi d’adapter différentes normes aux enjeux du changement climatique, et tout particulièrement au risque sécheresse. Par exemple, en étendant aux établissements du premier degré la possibilité de récupérer les eaux de pluie pour les sanitaires ou l’entretien des espaces extérieurs. Pour le moment, l’utilisation des eaux de pluie n’est en effet possible que dans les établissements du second degré.
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