Le confort d’été, aussi un enjeu de santé publique

canicule

Trop froides l’hiver, trop chaudes l’été. Ces passoires se transforment en bouilloires thermiques l’été. Avec le réchauffement climatique, le confort thermique n’a rien d’un accessoire, il devient un enjeu de santé publique. Pourtant, la Fondation Abbé Pierre estime que les pouvoirs publics n’en font pas assez aujourd’hui.

Nos logements sont rarement adaptés. A partir des millions de DPE réalisés depuis 2021 et compilés par l’Ademe, le syndicat Ignes et Pouget Consultants ont justement planché sur le sujet. Conclusion de l’étude publiée cet été: à peine un logement sur dix offrirait aujourd’hui un confort d’été suffisant. En clair, nos maisons, nos appartements, ne sont absolument pas préparés au réchauffement climatique et aux étés caniculaires qu’on nous promet dans un proche avenir.

Plus qu’un « confort d’été », la Fondation abbé Pierre y voit un véritable enjeu de santé publique. « Alors que 55 % des Français déclarent avoir eu trop chaud dans leur logement en 2023, on estime que l’été dernier a causé la mort de 5.000 personnes », livre la Fondation dans une nouvelle étude dédiée aux bouilloires thermiques. Pour une part des Français, l’été a même tendance à se transformer en calvaire. En s’appuyant sur les données de l’Ademe, la Fondation Abbé Pierre estime qu’un Français sur quatre souffre de la chaleur chez lui « fréquemment pendant l’été, dont 16% pendant presque toute la saison ».

Trois fois plus d’appartements bouilloires que de maisons

La précarité énergétique existe aussi à la belle saison, avec de profondes inégalités. « Plus fréquemment situés dans des zones urbaines, les appartements sont également trois fois plus souvent trop chauds que les maisons individuelles, surtout lorsque ces dernières profitent d’un espace extérieur. 62 % des ménages qui habitent en appartement déclarent ainsi avoir eu trop chaud chez eux en 2023. »

Les causes sont identifiées de longue date : une mauvaise isolation, un manque de volume avec des plafonds bas, l’absence de protections solaires et de volets aux fenêtres, l’impossibilité de créer un courant d’air parce que le logement n’est pas traversant… On retrouve ainsi certains des critères utilisés par le DPE pour évaluer le confort d’été.

Depuis sa réforme en 2021, le diagnostic apprécie aussi le confort d’été. La notion gagne du terrain. L’audit énergétique, remanié en 2024, exige également de prendre en considération le confort hygrothermique à chaque étape des travaux et l’aide MaPrimeRénov’ permet de financer des brasseurs d’air ou des protections solaires pour abaisser la température à l’intérieur du logement durant les canicules.

Des avancées encore trop timides

Insuffisant, toutefois, aux yeux de la Fondation Abbé Pierre, ces avancées sont jugées trop « timides ». MaPrimeRénov’ pourrait financer également la végétalisation des toitures ou les revêtements réfléchissants, les bailleurs pourraient être contraints d’installer des dispositifs occultants sur les parois vitrées situées au sud, à l’est ou à l’ouest, la notion de confort d’été pourrait être intégrée à la décence… La Fondation Abbé Pierre émet ainsi 25 propositions diverses et variées pour améliorer le confort d’été. Car « l’État reste de glace» face à ce problème de santé publique qui a entraîné 20.000 consultations aux urgences en 2023 dont 10.000 suivies d’une hospitalisation, souvent des personnes vulnérables, comme les femmes enceintes, les personnes âgées ou atteintes d’une maladie chronique.

Pour appuyer son discours, la Fondation Abbé Pierre fournit quelques chiffres. « En l’absence de politique d’adaptation suffisante la mortalité européenne liée à la chaleur pourrait continuer à augmenter, pour atteindre 68.000 décès en moyenne chaque été d’ici 2030, 94.000 d’ici 2040 et 120.000 décès d’ici 2100. » Santé publique France a réalisé des estimations à la surmortalité engendrée par les vagues de chaleur : le coût cumulé entre 2015 et 2020 est estimé entre 16 et 30 milliards d’euros. La facture pourrait toutefois enfler, avec un coût oscillant de 7 à 12 milliards par an en moyenne en France.

Pour répondre au défi du réchauffement climatique et enrayer l’explosion d’une climatisation énergivore (+75% de climatisations installées dans les résidences principales entre 2013 et 2020), la Fondation Abbé Pierre réclame une véritable prise en compte du confort d’été dans la rénovation énergétique. « L’adaptation n’a jusqu’ici pas été au cœur de nos politiques publiques de rénovation, qui se sont principalement intéressées à la réduction de la consommation d’énergie, à la décarbonation de nos modes de chauffage et au maintien d’une température minimale. » Autrement dit, favoriser, encore et toujours, une approche ambitieuse de la rénovation.

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