Amiante dans les écoles encore et toujours. Les premiers résultats de l’enquête lancée par l’Éducation nationale laissent entrevoir une situation toujours inquiétante. Beaucoup de diagnostics manquent encore à l’appel et les contrôles périodiques passent souvent à la trappe. Plus de 25 ans après l’interdiction de l’amiante, la réglementation continue à être largement bafouée.
Un député interrogeait le gouvernement début décembre. Un an après la sortie du documentaire Vert de rage, où en est l’enquête promise par l’Éducation nationale ? Le documentaire diffusé en 2023 dénonçait de potentielles expositions dans les établissements scolaires. Sur 14 écoles étudiées, 11 prélèvements révélaient la présence d’amiante, dont 5 inquiétants. Pour calmer le jeu, le ministère de l’Éducation nationale avait alors annoncé la réalisation d’une enquête/étude pour dresser un état des lieux.
Un an a passé, l’enquête a bien été menée, mais aucun chiffre n’a cependant été officiellement diffusé. Lors d’une présentation aux syndicats d’enseignants en novembre, quelques bribes laissent toutefois entrevoir une situation toujours inquiétante.
Deux tiers des établissements concernés par l’amiante
Sur les 58.784 établissements publics et privés sollicités, 33.162 réponses ont été recensées, soit un taux de réponse de 56,3%. Sans surprise, la problématique amiante concerne une majorité des établissements avec au moins un bâtiment sorti de terre avant 1997. Les deux tiers des écoles et des établissements (65,6%) ayant répondu font état de la présence de matériaux amiantés.
Le B.a.-ba de la prévention amiante voudrait que tous ces établissements aient un Dossier technique amiante (DTA) régulièrement mis à jour. C’est loin d’être le cas. « Le DTA, ou sa fiche récapitulative, n’est présent que dans la moitié des écoles et des établissements du panel, alors qu’il est obligatoire pour chaque bâtiment dont le permis de construire a été délivré avant le 1er juillet 1997 », déplore l’Unsa dans un document interne. Deux tiers des écoles avec des matériaux et produits amiante et une moitié seulement avec un DTA? Ça ne colle pas et ça laisse présumer des milliers et milliers d’écoles dépourvues de ce document obligatoire depuis… 2005.
Avoir un DTA, c’est bien, mais encore faut-il qu’il soit à jour. C’est l’essence même de ce dossier qui permet de tracer l’évolution des matériaux et produits amiante dans le temps, en veillant notamment à leur état de dégradation. Des évaluations de l’état de conservation voire des mesures d’empoussièrement doivent ainsi être réalisées au moins tous les trois ans selon la réglementation. Les écoles jouent-elles toutes le jeu ? Visiblement non. Selon l’Unsa, « les contrôles périodiques sont très insuffisants (76 % non effectués ou non informés) alors que ce sont ces contrôles qui vont déterminer s’il y a des risques avérés ».
Éternelle inertie
Entre les DTA non réalisés et ceux non mis à jour, la situation apparaît donc alarmante et laisse présumer de situations à risques dans les écoles. L’Unsa relève d’ailleurs l’existence de matériaux dégradés, susceptibles de relâcher leurs toxiques fibres dans leur environnement, en exposant élèves et personnels.
La situation n’a rien d’inédit. En 2016, déjà, une vaste enquête menée à l’échelle de l’Éducation nationale révélait qu’un tiers des écoles maternelles et primaires ne disposaient toujours pas du précieux DTA. Beaucoup de bruit, quelques annonces ministérielles, mais la situation ne semble guère s’améliorer. Plus de 25 ans après son interdiction en France, il est toujours très difficile de disposer d’une photographie précise de l’amiante dans le parc scolaire en dehors d’enquêtes parcellaires : celle de 2016, la plus complète à ce jour ne portait que sur 15.000 établissements.
La difficulté est que le bâti scolaire relève tantôt des communes, tantôt des départements et des régions. Selon l’Unsa, des mesures semblent enfin avoir été mises en place. Une démarche a été initiée auprès des académies, pour permettre de récupérer les DTA auprès des collectivités. Une convention a également été signée début novembre entre l’Éducation nationale et la présidente des Régions de France, engageant les régions à transmettre au ministère des données techniques relatives à la sécurité des lycées. Pour l’amiante, mais aussi pour le plomb ou le radon, ce gaz radioactif. Ce qui devrait permettre, enfin, de se faire une idée précise de la situation amiante dans les écoles de France et de Navarre.
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