Quinze ans ont (déjà) passé depuis le Grenelle de l’environnement, que l’on annonçait comme le big bang de la rénovation. Pourtant, malgré des milliards d’euros engloutis, cette rénovation énergétique reste toujours en dessous des objectifs. Rencontre, avec Dominique Estrosi Sassone, sénatrice des Alpes-Maritimes et présidente de la Commission d’enquête sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique.
Le constat est là. « La France affiche des objectifs ambitieux qu’elle n’arrive jamais à tenir en particulier en matière de rénovation globale et performante, les seules rénovations qui vont nous permettre d’atteindre la stratégie nationale bas carbone en 2050. » En quinze ans, les lois se sont succédé, empilant les dispositifs et ajoutant parfois de la confusion. En quinze ans, les objectifs ont souvent été ambitieux, mais ils n’ont jamais été atteints.
Bien sûr, la commission présidée par Dominique Estrosi Sassone est loin d’avoir fini ses auditions et ses déplacements sur le terrain. Mais il y a déjà quelques constats largement partagés. « Tous les acteurs que nous avons auditionnés, nous disent que nous avons besoin de simplification, de lisibilité, de visibilité et de pérennité. On ne peut plus continuer à avoir une politique de rénovation énergétique ambitieuse avec des mesures qui ne cessent de changer, un stop and go permanent. »
Parce que la politique de rénovation, et plus généralement la politique de logement, ne correspond pas au temps politique. « Il faut considérer que le temps du logement est un temps long qui ne peut coller avec mesures qui ne cessent de changer. »
« Une crise telle que notre pays l’a connue
au moment de l’hiver 54 »
La commission du Sénat remettra son rapport en juin avec des propositions en faveur d’une politique de rénovation davantage efficiente qui atteigne, enfin, les objectifs ambitieux. Mais la sénatrice des Alpes-Maritimes a déjà la conviction que cette rénovation ne peut se faire au détriment de la construction neuve. Car il y a ce « petit bruit inquiétant qui monte et qui laisserait penser que nous n’aurions pas besoin de construire de logements neufs en nombre important ». Parce que la rénovation énergétique et la remise sur le marché de logements vacants seraient suffisantes pour absorber la demande.
Dominique Estrosi Sassone en doute. La rénovation ne doit pas se faire au détriment de la construction neuve si on veut résorber la crise du logement. « Notre pays connaît une crise du logement qui ne cesse de s’amplifier ces dernières années. (…) Si on ne fait rien, si on ne prend pas des mesures importantes, on risque de retrouver une crise du logement telle que notre pays l’a connue au moment de l’hiver 54 lorsque l’Abbé Pierre a lancé son fameux appel. »
Relance de la construction neuve ou du PTZ, TVA à 5,5%, simplification des aides à la rénovation, aide au logement social… La sénatrice appelle à une mobilisation de tous les moyens. “Le gouvernement continue à traiter le logement par le petit bout de lorgnette et pas à la hauteur d’une priorité nationale comme cela devrait être.” Pour la sénatrice, il est nécessaire d’encourager une politique davantage territoriale. « Je crois beaucoup à une politique territorialisée du logement avec l’État qui fixe un cadre général mais qui donne aussi la main aux territoires car d’une collectivité locale à une autre, d’un département à l’autre, d’une région à l’autre, les problématiques, les difficultés, les obstacles ne sont pas les mêmes. » Autrement dit, plutôt qu’une politique du logement et de la rénovation décidée uniquement depuis Paris, une politique avec « plus de souplesse et plus d’agilité ».
Bonne écoute !
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