Changer le DPE pour réhabiliter les logements chauffés à l’électricité

Trop pénalisé, le chauffage électrique? Une proposition de loi au Sénat propose de revoir la méthode de calcul du DPE en abaissant drastiquement le coefficient d’énergie primaire (CEP) pour le ramener au même niveau que le gaz ou le fioul. Ce qui aurait pour effet immédiat de relever le classement énergétique de tous les biens chauffés à l’électricité, mais aussi de lever un frein à l’amélioration des logements.

C’est une petite modification de rien du tout dans la méthode de calcul, mais aux conséquences extrêmement lourdes. Deux sénateurs de Haute-Savoie, Sylviane Noël et M. Cyril Pellevat, proposent de corriger le coefficient d’énergie primaire pour l’électricité. Déjà passé de 2,58 à 2,3 avec la réforme du DPE en 2021, les deux élus veulent carrément le supprimer. Autrement dit, un kWh d’énergie finale correspondrait à 1 kWh en énergie primaire, en électricité, comme le gaz, le fioul ou même le charbon.

“Le nouveau DPE (…) impose à l’électricité une pénalité qui conduit à multiplier la consommation réelle du logement prise en compte pour le calcul du DPE. Cette pénalité infligée à l’électricité, décarbonée en France à 92%, va à l’encontre des objectifs climatiques étant donné qu’un logement chauffé au gaz émet environ 227 g de CO2 par KWh quand le logement chauffé à l’électricité émet moins de 40 g de CO2 par KWh selon RTE.” Pour les deux sénateurs, ce fameux CEP alourdit donc, injustement, la note DPE des logements chauffés à l’électricité avec le risque, parfois, de les voir privés de location à partir de 2025 ou de 2028.

Lever un autre frein à la rénovation

Toucher à ce fameux CEP -toujours source d’âpres discussions par le passé- permettrait, mécaniquement, d’améliorer le classement DPE des biens chauffés à l’électricité. Par exemple, les studios et autres petites surfaces, souvent tout-électriques et souvent pénalisés par le DPE aujourd’hui, pourraient ainsi sortir des passoires énergétiques.

Dans l’exposé des motifs qui accompagne la proposition de loi, les deux sénateurs estiment par ailleurs que l’actuel CEP nuit à l’amélioration de la qualité des logements. Car si le gouvernement et le DPE encouragent l’installation de pompes à chaleur fonctionnant aussi à l’électricité, ces solutions restent “très coûteuses et loin d’être évidentes pour les propriétaires”.

Si le propriétaire d’une maison individuelle n’aura guère trop de difficultés -du moins techniques- à basculer du gaz ou du fioul vers une pompe à chaleur, c’est une autre paire de manches lorsqu’il s’agit d’un appartement équipé aujourd’hui de convecteurs électriques. “Dans l’ancien, l’installation de pompes à chaleur ne peut être généralisée pour des raisons techniques évidentes: l’obligation de remplacer des convecteurs par de coûteux réseaux de radiateurs à eau ou de conduits d’air, mais aussi environnementales ou simplement de réglementation liée à la copropriété (en particulier en ce qui concerne les appartements), ou encore en raison de contraintes de sites protégés comme cela peut être le cas en zone de montagne ou littorale.”

Ce CEP a donc de fâcheuses conséquences pouvant rendre un logement inlouable ou invendable. “Par exemple, un logement déjà correctement isolé, dont la consommation réelle en énergie finale est de 150 KWh/m² par an est classé F en prenant en compte l’énergie primaire”, poursuivent les deux sénateurs dans l’exposé des motifs. “Pour lui faire gagner un niveau dans le DPE, soit un niveau E, le propriétaire devra engager des travaux importants de l’ordre de 30.000 à 40.000 euros au mieux pour un gain de consommation réel établi à 30%, ceci sans gain réel perceptible d’émissions de CO2.”

Pour les deux sénateurs, un “diagnostic prenant en compte l’énergie primaire apparaît injustifié et inadapté pour évaluer la qualité thermique d’un logement car il ne renseigne pas réellement sur cette dernière”.

Proposition de loi visant à atténuer la crise du logement par une modification rationalisant la méthode de calcul du diagnostic de performance énergétique, déposée le 11 octobre.