Une réforme peut en cacher une autre. En écho aux annonces répétées de Christophe Béchu, Bercy a évoqué, lundi, une autre modification au DPE. Une évolution de taille puisqu’il s’agit de toucher au sacro-saint coefficient d’énergie primaire. Ce qui se traduirait par des centaines de milliers de passoires thermiques en moins.
Officiellement, on ne touche pas à la méthode de calcul. Lors d’un brief à la presse, lundi soir, le ministère de la Transition écologique assurait qu’aucune autre évolution du DPE n’était dans les cartons. Ni pour le bâti ancien, ni pour les logements chauffés à l’électricité, ni pour quoi que ce soit d’autre. On ajoute un coefficient de pondération pour les petites surfaces jusqu’à présent pénalisées, un point c’est tout. « On ne touche pas à la méthodologie du DPE qui est robuste et fiable », affirmait le cabinet de Christophe Béchu. « A ce stade », pas d’autre projet sur la table.
Du côté de Bercy, c’est pourtant un autre son de cloche qui se fait entendre. Bruno Le Maire s’était déjà exprimé sur le sujet en octobre, désormais chargé du portefeuille énergie, il revient à la charge. Lundi, le ministre de l’Économie plaidait pour corriger le CEP (coefficient d’énergie primaire) utilisé dans la conversion de l’énergie finale (l’énergie consommée par l’usager) en énergie primaire (l’énergie présente dans la nature).
A ce petit jeu, l’électricité dotée d’un CEP de 2,3 (2,58 jusque 2021) apparaît en effet perdante. 1 kWh en énergie finale équivaut à 2,3 kWh en énergie primaire pour l’électricité, quand pour le gaz 1 kWh d’énergie finale = 1 kWh d’énergie primaire. Résultat des courses, puisque l’étiquette DPE se base sur l’énergie primaire, un logement chauffé à l’électricité sera moins bien classé que le même logement avec exactement les mêmes caractéristiques mais chauffé au gaz.
Un “souhait” de Bruno Le Maire
Du coté de Bercy, on crie à l’injustice. Bruno Le Maire pousse donc à « faire évoluer le coefficient de conversion énergétique ». « Aujourd’hui, un logement au gaz qui passe à l’électricité peut basculer en passoire à cause de cette méthodologie, alors qu’il divise ses émissions de gaz à effet de serre par 3 ». Deux sénateurs de Savoie avaient déjà déposé une proposition de loi en 2023 pour réclamer pareille correction.
Une telle modification au DPE aurait un impact considérable, en particulier dans le parc locatif où les bailleurs privilégient souvent l’électricité comme mode de chauffage. Bercy estime qu’elle équivaudrait à « sortir des centaines de milliers » de logements de leur statut de passoires. De quoi donner une bouffée d’oxygène supplémentaire en pleine crise du logement pour certains, de quoi aussi faire reculer la rénovation énergétique pour d’autres.
Pour le moment, il s’agit encore d’un « souhait » de Bruno Le Maire, qui doit encore être arbitré. « Bruno Le Maire souhaite continuer à travailler avec Christophe Béchu sur l’évolution de la méthodologie du DPE, notamment sur le volet coefficient de conversion énergétique, qui désavantage l’électricité et avantage le gaz», selon le ministère.
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