On est loin encore d’un quelconque assouplissement, mais au sein du gouvernement farouchement opposé à tout report, une porte vient de s’entrouvrir. Depuis la loi Climat et résilience, la donne a changé, dans un entretien au Parisien, le ministre de l’Économie évoque la possibilité de “décaler” le calendrier.
Si près de nous, et déjà si loin. Le calendrier des interdictions de location dessiné par la loi Climat et résilience n’a que deux ans, à peine. Oui, mais à l’époque les prêts demeuraient à des taux ridiculement bas, et personne n’avait songé au retour brutal de l’inflation, en particulier sur les matériaux de la construction. La capacité des ménages à mener à bien une rénovation se trouve singulièrement amoindrie.
Ce nouveau contexte invite donc à revoir la copie. “Tout ce qui a été décidé avant la hausse des taux mérite d’être regardé à nouveau à l’aune de cette crise, explique Bruno Le Maire dans un entretien au Parisien, mardi. Ce qui était possible lorsque l’argent était disponible devient impossible avec des taux aussi élevés. Il faut être très pragmatique et regarder si on peut décaler les calendriers.”
“A titre personnel”, le ministre de l’Économie se dit même “très favorable” à un report du calendrier des interdictions de location, notamment pour les copropriétés. “Avec mon collègue de la Transition écologique Christophe Béchu, nous sommes prêts à ouvrir ce débat.” On est loin encore d’un quelconque report, mais c’est peut-être l’amorce d’un virage.
Économie vs écologie
Car depuis deux ans, en dépit des revendications du monde de l’immobilier jugeant ce calendrier franchement “intenable”, le gouvernement n’a cessé d’opposer une fin de non recevoir. “On veut tenir le calendrier”, disait encore Patrice Vergriete, le ministre du Logement, pas plus tard qu’en début de mois, tout en reconnaissant la difficulté d’une rénovation en copropriété. Pas assez de temps, pas assez d’entreprises qualifiées RGE, et souvent aussi une rénovation trop coûteuse pour les copropriétaires comme le montrent régulièrement les enquêtes d’opinion.
Le ton est peut-être en train de changer. Empêtré dans une crise du logement, le gouvernement cherche des solutions pour désamorcer cette bombe sociale et relancer un marché immobilier en panne. L’interdiction de location qui pèse sur les logements classés en G dès le 1er janvier 2025 promet en effet d’alimenter de plus belle cette crise: quelque 600.000 logements en public ou en privé sont aujourd’hui directement ciblés par cette interdiction, dont une bonne part en copropriété. Dans un marché locatif déjà sous tension, se priver de ce parc pourrait sembler incongru.
Ecologie et économie s’opposent une nouvelle fois. Si un report du calendrier répond au souhait des professionnels de l’immobilier qui y voient une mesure de bon sens, il apparaît toutefois comme une sévère reculade aux yeux du défenseur du climat. Un camouflet, même, quelques jours après la prise de parole présidentielle sur la planification écologique, et la promesse d’une accélération de la rénovation énergétique. Les premières réactions n’ont guère tardé, y compris au sein de la majorité. Dès mardi, sur France 2, Yaël Braun-Pivet la présidente de l’Assemblée nationale, laissait entendre son désaccord, estimant qu’on ne pouvait pas “renvoyer à la Saint Glinglin” l’interdiction de location de passoires.
MAJ: Rétropédalage en règle. La prise de position du ministre de l’Économie n’est visiblement pas passée au sein de la majorité. Bruno Le Maire est donc revenu sur son propos, dans un vrai numéro d’équilibriste: “il n’est pas question de modifier le calendrier tel qu’il a été déterminé” et s’il reste “très favorable” à un report du calendrier, c’est bien sûr “à titre personnel” qu’il faut l’entendre. Quant à la rénovation, elle peut aussi se faire “étape par étape”, pour permettre par exemple, aux passoires en G de passer en F comme l’avait déjà évoqué le ministre du Logement, début septembre.
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