Entre inflation galopante et hausse des tarifs de l’énergie, la précarité énergétique a-t-elle augmenté en 2022? Le bouclier tarifaire ou les chèques énergie ont à l’évidence amorti le choc. Mais pas suffisamment semble-t-il. Dans son dernier baromètre en mars, l’Observatoire national de la précarité énergétique (Onpe) évoque “des conséquences lourdes” même si la hausse est restée “maîtrisée”.
Il y a des signaux qui ne trompent pas. Dans son bilan dévoilé fin mars, le Médiateur de l’énergie révélait une hausse significative des factures impayées. “Ce sont 863.000 interventions pour impayés des factures d’énergie qui ont été mises en œuvre en 2022, soit 10% de plus qu’en 2021.” Cela vaut pour l’électricité (767.000 interventions réalisées, +9% par rapport à 2021) comme pour le gaz (97.000 coupures pour impayés, +17% par rapport à 2021).
Une intervention de l’énergéticien n’est pas toujours synonyme de coupure systématique. En matière d’électricité, les coupures ont même tendance à baisser sérieusement (157.000 contre 254.000 en 2021), mais c’est un trompe-l’œil puisque les réductions de puissance connaissent dans le même temps une inflation sans précédent (609.000 en 2022 contre 448.000 en 2021). Changement de politique, les fournisseurs d’énergie, EDF en tête, préfèrent désormais réduire la puissance délivrée plutôt que couper purement et simplement la fourniture.
Plus d’un quart des Français a du mal à payer ses factures
La hausse des impayés n’est pourtant pas le seul indicateur relevé par l’Onpe. Corollaire de ces impayés, de plus en plus de ménages reconnaissent avoir des difficultés à s’acquitter de leurs factures: 27% en 2022, contre 25% en 2021 et 18% en 2019. 82% des foyers interrogés déclarent que les factures d’énergie représentent aujourd’hui une part importante des dépenses de leur foyer (79% en 2021
et 71% en 2020).
Le baromètre de l’Onpe regorge d’indicateurs qui montrent souvent une dégradation. 22% des ménages disent avoir souffert du froid durant l’hiver 2021-2022 (29% chez les locataires, 35% chez les moins de 35 ans). Le logement est difficile à chauffer pour 8,4% des propriétaires, contre 21,2% des locataires du parc privé et 17,3% du parc social. Les raisons financières sont désormais la première explication avancée devant la mauvaise isolation du logement. 69% des personnes (9 points de plus qu’en 2021) expliquent aussi avoir restreint le chauffage pour éviter une facture trop salée. Notamment chez les plus jeunes où la proportion augmente singulièrement (51% des 18-34 ans, contre 46% en 2021 et 32% en 2020).
3,4 millions de ménages en précarité énergétique
Curieusement, alors que la consommation énergétique du parc français baisse année après année, la facture augmente. “La facture énergétique des ménages augmente nettement en 2021 (+14,8% en euros constants), portée par le rebond des dépenses en carburants (+ 25,9%). Elle représente ainsi en moyenne 3.141 euros, dont 1.720 euros liés à l’énergie dans le logement et 1.420 euros d’achat de carburants en 2021.” Les dépenses énergétiques du logement augmentent quant à elles de 7%.
Fort logiquement, le taux d’effort énergétique (TEE) qui permet à l’Onpe de mesurer la précarité énergétique, suit la même tendance avec une légère hausse. “En 2021, 11,9 % des ménages vivant en France métropolitaine, soit 3,4 millions de ménages, sont en situation de précarité énergétique”, expliquent les auteurs du rapport.
Pas d’explosion des chiffres, donc, le bouclier tarifaire et les chèques énergie ont amorti le choc. Mais dans un contexte inédit relevé par l’Onpe, l’accumulation de signaux laisse entrevoir une montée inexorable de la précarité énergétique, et par ricochet un besoin urgent de rénovation.
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