Bruno Tudal, est conseiller médical en environnement intérieur. Il est aussi co-auteur de La qualité de l’air intérieur pour les nuls. Il assure également les fonctions de co-gérant de Biodiv’AirSanté France et de vice-président de l’APQAI (Association de promotion de la qualité de l’air intérieur) et vice président de PEPITEE (Pôle européen pour l’innovation, la transition énergétique et l’environnement).
Nous le savons tous, la crise énergétique est là et elle impacte directement nos logements : isolation bien sûr, mais aussi chauffage et parfois climatisation… Ça fait beaucoup de choses à étudier et il est facile de foncer tête baissée après quelques calculs de rentabilité gribouillés sur les factures d’énergie. Mais n’oubliez pas qu’un logement c’est fait pour y vivre, et donc y respirer !
La rénovation thermique est souvent une mauvaise nouvelle pour la qualité de l’air intérieur (QAI), pour plusieurs raisons :
-on transforme avec de nouveaux matériaux un logement qui n’avait pas été prévu pour cela,
-on réfléchit à la performance avant de penser au bien-être,
-on ne croise que rarement des informations sur la QAI au cours d’une rénovation.
Il est crucial d’anticiper la qualité de l’air au risque de regretter d’avoir rénové
Dans mon parcours de Conseiller médical en environnement intérieur (CMEI), j’ai souvent été contacté quelque temps après ce type de travaux par des occupants désenchantés. Voici quelques exemples pour illustrer mon propos.
J’ai le souvenir d’appartements dans des bâtiments anciens, où un changement de menuiseries a été opéré pour passer à du double-vitrage. C’est un motif très courant de rénovation, sauf que les entrées d’air n’ont pas été fournies avec les fenêtres !
Résultat : en l’absence de renouvellement d’air, l’humidité produite simplement en occupant le logement a favorisé le développement de moisissures dans les placards et derrière les meubles. Les moisissures ont un effet néfaste sur la santé respiratoire (asthme ou infection respiratoire notamment).
Je suis également intervenu dans des maisons de campagne qui avaient installé des poêles à bois ou à granulés sans prendre en compte le fait que les matériaux au-dessus allaient chauffer. Le pire exemple en la matière a été l’aménagement d’une salle de jeu pour enfants juste au-dessus, sans aucune ventilation.
Résultat : les matériaux ont libéré de grandes quantités de Composés organiques volatils et semi-volatils (COV et COSV) dont du formaldéhyde, qui est la forme gazeuse du formol et que l’on retrouve dans les panneaux de bois par exemple. Ce sont des substances particulièrement irritantes pour les voies respiratoires, potentiellement cancérigènes et classées perturbateurs endocriniens.
J’ai eu de nombreux appels de personnes âgées à qui l’on a installé des isolants sous le prétexte de « l’isolation à 1 euro » et qui n’ont pas vérifié les produits utilisés ni la conformité de l’installation.
Résultat : les conséquences sont diverses, mais ces personnes ne pouvaient plus rester dans leur maison après les travaux. Soit le système de ventilation était endommagé, soit il y avait de fortes odeurs, soit des infiltrations ont endommagé les plafonds…
J’aurais de nombreux autres exemples, mais l’essentiel est là : pensez à respirer !
L’impact du logement sur la santé est aujourd’hui largement sous-estimé par le grand public. Notre air est beaucoup moins surveillé que notre eau ; pourtant, si l’on peut rester 3 jours sans boire, on ne peut rester que trois minutes sans respirer. Et on ne peut pas respirer correctement dans une maison où l’air n’est pas suffisamment renouvelé.
Il faut s’informer et faire preuve de bon sens : on évite les sources de polluants et on vérifie que le renouvellement d’air sera suffisant dans toutes les pièces.
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