Apparemment, le diagnostiqueur n’a pas visité les combles. Sinon, l’infestation termites ne lui aurait pas échappé. Par endroits, la charpente apparaît si endommagée que la maison risque de s’effondrer. Mais le vendeur n’a pas été vraiment loyal: il savait son bien envahi par les parasites, et pourtant il s’est bien gardé de le dire…
Le rapport de l’expert judiciaire est alarmant. Les termites menacent sérieusement la structure, certaines pièces de la charpente apparaissent si dégradées qu’il évoque “un risque avéré de ruine”. Un pan de la toiture est “infesté à 50% par des termites réticulitermes européens avec présence d’un siège de termites actifs”. Un étaiement conservatoire a été nécessaire, et le bâtiment exige d’important travaux de réfection. Une partie de la toiture doit en effet être déposée, et les bois de charpente éliminés, pour un coût qui avoisine les 75.000 euros.
En attendant, le risque d’effondrement rend la maison inhabitable. “Il ressort de l’expertise judiciaire et des photographies versées aux débats que les désordres constatés sur l’immeuble litigieux rendent celui-ci impropre à son usage normal d’habitation ou diminuent tellement cet usage que les acquéreurs ne l’auraient pas acquis, ou n’en auraient donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.” Pour l’expert, aucun doute, les termites s’étaient déjà installés dans cette maison d’Occitanie, bien avant la conclusion de la vente en 2020.
Les combles sont passés à la trappe
Un diagnostic termites a pourtant été réalisé au moment de vendre. Dans son rapport, le diagnostiqueur a conclu à “l’absence d’indice de présence de termites dans la maison”. Comment l’infestation a pu lui échapper? Pour la cour d’appel, il est clair que l’opérateur n’a pas visité le grenier. “(Il) aurait dû constater, ainsi que l’a fait l’expert judiciaire dès sa première visite, la présence d’une trappe de visite des combles. (…) Il suffisait à l’opérateur(…) de passer la tête à travers cette trappe pour découvrir à seulement 30 cm de lui une poutre de charpente présentant en partie supérieure un important cordonnet de termites.” Le professionnel a donc commis une “faute de négligence en ne contrôlant pas les combles accessibles par cette trappe”.
Mais le technicien n’est cependant pas le seul fautif. Dans son arrêt rendu en juillet, la cour d’appel de Montpellier retient aussi la responsabilité de la propriétaire venderesse qui a fait intervenir le diagnostiqueur “sans l’informer de la présence de termites, ou à tout le moins sans l’informer des dégradations importantes affectant la charpente qu’elle avait découvertes lors de travaux de réfection”. “Bien qu’étant auteur d’une faute de négligence, (le diagnostiqueur) a été volontairement trompé par son client donneur d’ordre.”
Le vendeur n’a pas tout dit
Quatre ans avant la vente, la propriétaire avait en effet réalisé des travaux de réfection sur la toiture en auto-construction. Là aussi, l’expert est formel, il était impossible de passer à côté des termites: des cordonnets présents ont été écrasés avec la mise en place du nouveau litelage et déjà à l’époque, la panne centrale ne présentait plus aucune qualité mécanique. “L’expert judiciaire a relevé que le litelage n’avait pas été cloué sur cette panne alors qu’il l’avait été sur toutes les autres pannes. En effet, cette panne avait tellement été attaquée par les termites qu’elle ne présentait déjà plus aucune résistance mécanique en 2016: il n’était alors pas possible de clouer des liteaux sur cette panne.”
Pour la cour d’appel, la propriétaire a sciemment dissimulé l’infestation, à la fois auprès du diagnostiqueur, mais aussi auprès des acquéreurs en décidant de “les maintenir dans l’ignorance de ce sinistre afin de leur vendre au prix normal du marché une maison infestée de termites qui était condamnées à s’effondrer à court ou à moyen terme”.
Diagnostiqueur et vendeur sont donc condamnés in solidum, l’un pour sa négligence, l’autre pour sa mauvaise foi. Ils devront verser aux acquéreurs la coquette somme de 88.000 euros qui comprend à la fois les travaux de réfection de la toiture, les frais de relogement ou de garde-meuble.
Cour d’appel de Montpellier, 7 juillet 2022, n° 22-01766.
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