Le vendeur oublie de dire que sa maison avait été inondée un an auparavant

Inondation_rue

Le vendeur a un devoir de loyauté envers son acquéreur. En passant sous silence l’inondation survenue à peine un an auparavant, il a commis une faute. La sentence est douloureuse : la vente est purement et simplement annulée.

L’acte de vente mentionnait bien un risque d’inondation dans la commune. Pour les vendeurs, l’information était « suffisante et loyale sur l’importance du risque d’inondation du bien ». Devant la cour d’appel, ils énumèrent les différents documents transmis lors de la transaction en 2017. Outre l’état des risques, on trouve annexés à l’acte de vente, l’arrêté de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle de 2016, l’arrêté indiquant que la commune exposée au risque d’inondation et fait l’objet d’un plan de prévention des risques inondations, ainsi qu’une note d’urbanisme contenant des informations sur les risques majeurs d’inondation sur la commune et des informations sur le bien.

Une lacune, toutefois. Dans la déclaration de sinistres indemnisés, obligatoire depuis 2016, ils n’ont pas coché la case relative à une éventuelle indemnisation versée. « Un simple oubli de leur part en l’absence d’indication par leur notaire sur la nécessité de remplir cette rubrique », soutiennent les vendeurs devant la cour d’appel de Versailles.

En face, les acquéreurs, victimes d’une inondation en 2018, un an seulement après avoir emménagé, estiment au contraire que plusieurs informations déterminantes leur ont été « sciemment cachées ». Pas un mot de l’inondation de 2016 ou de l’existence d’une pompe de relevage justement installée après ce sinistre. Le bien est construit sur des nappes phréatiques, le sous-sol aménagé par leurs soins en chambre parentale n’est pas habitable, les acquéreurs réclament donc la résolution de la vente.

“Silence dolosif”

Les acquéreurs ont-ils été suffisamment informés ? Ou au contraire, les vendeurs ont-ils manqué à leur obligation de loyauté ? Pour la cour d’appel, face à un tel risque d’inondation, même si le bien se trouve en dehors du périmètre du plan de prévention des risques naturels (PPRI), les vendeurs ne pouvaient se contenter d’annexer l’arrêté catastrophe naturelle « affectant d’une façon générale la commune ». Ils auraient dû informer les acquéreurs de leur récent sinistre.

Pour la cour d’appel, il y a donc bien « un silence dolosif » de la part des vendeurs qu’atteste d’ailleurs l’agent immobilier dans sa déclaration –« les propriétaires n’ont jamais évoqué ni la pompe de relevage ni les problèmes d’inondations qu’ils ont rencontrés avant la vente »– ou l’absence d’une mention sur la pompe enterrée dans la cave au chapitre « dispositif particulier » de l’acte de vente.

La cour d’appel y voit pourtant une information essentielle. Selon l’acte de vente, la maison est élevée sur un sous-sol avec local technique, buanderie, bureau, deux pièces, salle d’eau, WC… « Dès lors, cacher la survenue d’une inondation intervenue environ un an avant la signature du compromis et concernant presque un tiers de la surface du bien, puisque le sous-sol est considéré comme pièce à vivre, ne peut être qu’une information déterminante pour les éventuels acquéreurs quant au risque pris qu’une telle inondation survienne de nouveau. »

La cour d’appel confirme donc la décision rendue par les premiers juges. La vente est annulée, les vendeurs devront restituer le montant de l’achat, quelque 390.000 euros. Les vendeurs devront également verser 23.000 euros en remboursement des frais de notaire. En revanche, les acquéreurs qui demandaient le remboursement des frais liés à leur emprunt sont déboutés : « le caractère indissociable de l’opération d’achat et de crédit entraîne pour la banque l’obligation de restituer les intérêts et frais perçus à l’occasion de l’emprunt ».

Obligés d’acheter un autre bien, les acquéreurs réclamaient également 70.000 euros de dommages et intérêts pour prendre en compte la hausse du marché immobilier au cours des dernières années. La cour d’appel leur en octroie 20.000 euros.

Cour d’appel de Versailles, 3e chambre, 30 mars 2023, n° 21/03214.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire