Souvent négligé, l’état des risques n’a rien d’anodin. Son absence ou même une erreur entache la transaction. Dans cette affaire, les vendeurs avaient passé sous silence certains sinistres survenus dans leur maison. Treize ans plus tard, la cour d’appel de Montpellier annule tout simplement la vente.
La maison avait déjà été inondée par le passé, mais rien ne le laissait penser au moment de la vente en 2010. Ce n’est que quatre ans plus tard, que les acquéreurs découvrent le pot aux roses après une nouvelle inondation de leur bien. Un arrêté est pris, reconnaissant la commune en état de catastrophe naturelle, « le douzième arrêté portant reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle depuis 1982 concernant la commune (…), dont 6 pour inondations et coulées de boues ».
Pour l’acquéreur, il a manifestement été trompé, les vendeurs ont délibérément caché ces inondations à répétition. D’autant qu’ils avaient déjà été victimes d’une importante inondation en 2002, pour laquelle ils avaient été indemnisés et pour laquelle ils ont choisi de de ne rien au moment de la vente.
Bien sûr, un état des risques a été fourni par les vendeurs au moment de la promesse de vente, mais incomplet puisqu’il ne mentionne aucun sinistre indemnisé. C’est pourtant une obligation: lors de la réalisation d’un état des risques, le propriétaire est tenu de déclarer l’existence ou non de sinistre sur le bien bâti, ayant donné lieu à une indemnisation. La faute est donc caractérisée. « L’information donnée à l’acquéreur par les vendeurs lors de la vente apparaît dès lors clairement comme mensongère », estime d’ailleurs la cour d’appel de Montpellier.
Clause litigieuse
Pour autant, l’acquéreur verra sa demande en nullité de la vente rejetée en première instance en raison d’une clause litigieuse. Le juge estimera la demande non fondée puisque : « l’acquéreur avait reconnu dans l’acte de vente avoir été informé de cet état des risques naturels et technologiques et avait déclaré vouloir en faire son affaire personnelle. Il a également retenu qu’il était stipulé au sein de l’acte authentique de vente que l’acquéreur renonçait à poursuivre la résolution du contrat ou à demander au juge une diminution du prix ».
La cour d’appel estime que cette renonciation s’applique uniquement dans le cadre de la communication de l’état des risques. « Contrairement à l’analyse du premier juge, l’acquéreur peut en l’espèce demander la résolution de la vente si les dispositions de l’article L 125-5 IV du code de l’environnement ne sont pas respectées, ce qui est le cas en l’espèce, le vendeur ayant faussement déclaré que le bien n’avait pas subi de sinistre lié à une catastrophe naturelle. »
Treize ans après la signature de l’acte authentique, la cour d’appel prononce donc la nullité de la vente. Et puisque la responsabilité du notaire est écartée (« Si le notaire est débiteur d’une obligation de vérification, cette obligation ne va pas jusqu’à remettre en doute les éléments techniques figurant sur un diagnostic »), les vendeurs supporteront seuls la nullité de vente.
Et comme souvent en pareille affaire, la note est salée. Les vendeurs devront bien entendu restituer le prix de vente (400.000 euros) mais aussi indemniser leur acquéreur des frais de vente (20.000 euros) et des frais de notaires (26.000 euros). Plus de 456.000 euros au total, pour s’être montré déloyal au moment de la vente.
Cour d’appel de Montpellier, 28 septembre 2023, n° 19/02608.
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