C’est une harmonisation plutôt bienvenue. Quelle que soit leur validité restante, les DPE réalisés avant la réforme de juillet 2021 deviendront obsolètes à partir du 1er janvier 2025. Enfin. Mais cette harmonisation réserve aussi son lot de surprises, bonnes ou mauvaises, pour les propriétaires qui risquent fort de voir leur étiquette évoluer.
Le sursis touche à sa fin. Dès l’entrée en vigueur de la réforme en juillet 2021, le ministère avait programmé la fin des DPE édités auparavant. D’abord, les DPE antérieurs à 2018 obsolètes depuis 2023; à présent, les diagnostics réalisés de 2018 à juin 2021 qui devront disparaître des petites annonces, des contrats de vente ou de location. A partir du 1er janvier 2025, pour louer ou vendre, il faudra impérativement un DPE réalisé après juillet 2021.
Valse des étiquettes
Pour les acteurs de l’immobilier, c’est la fin d’une cohabitation délicate entre nouveaux et anciens DPE. Les Notaires avaient d’ailleurs demandé de mettre fin prématurément à cette période transitoire jugée d’une « incohérence totale ». Même s’il conservait toute sa valeur juridique, l’ancien diagnostic apparaissait désuet. Tant le nouveau DPE, même si son nom n’a pas varié, n’a décidément plus grand-chose à voir avec le diagnostic d’avant 2021.
Justement, parce qu’ancien et nouveau DPE n’ont plus grand-chose de commun, les propriétaires risquent parfois d’avoir des surprises. Bonnes ou mauvaises. Lors de la réforme de 2021, le ministère de la Transition écologique s’était livré à des estimations : quatre logements sur dix voyaient leur étiquette sauter d’une voire plusieurs classes énergétiques. Tantôt en plus, tantôt en moins.
C’est notamment le cas des logements avec un chauffage électrique qui grâce à un coefficient d’énergie primaire plus favorable (passé de 2,58 à 2,3) peuvent voir leur étiquette s’améliorer. A l’inverse, les propriétaires de logements avec leur bonne vieille chaudière au fioul risquent de déchanter: ce type d’énergie est davantage pénalisé dans le DPE version 2021 qui prend désormais en considération les émissions de gaz à effet de serre pour l’étiquette finale du bien.
Propriétaire qui rit, propriétaire qui pleure
De façon générale, dans les logements anciens (d’avant 1948) ou dans le logement collectif, pour lesquels l’opérateur usait nécessairement de la méthode sur factures, il y a de grandes chances pour que le classement ne soit plus (du tout ?) le même. L’explication est simple, avant l’étiquette reposait sur les consommations réelles des occupants, aujourd’hui elle reflète uniquement les performances intrinsèques du bâtiment.
Une mauvaise surprise peut en cacher une autre, car cette évolution programmée vient se télescoper de plein fouet avec le calendrier des interdictions de location voulu par la loi Climat et résilience. Par exemple, le propriétaire-bailleur qui avait loué un logement en D ou E en 2020 risque de se retrouver avec une passoire énergétique avec tout ce que cela sous-entend aujourd’hui comme obligations de travaux. Idem pour celui qui avait acheté sa maison voilà quelques années, avec une étiquette C et qui s’apercevra peut-être en la revendant que son nouveau classement n’est plus aussi vertueux. En prime, s’il met son bien en vente, on lui demandera peut-être même d’effectuer un audit énergétique (déjà obligatoire pour les monopropriétés en F et G, élargi aux logements en E à partir du 1er janvier 2025).
Le mouvement perpétuel du DPE
Au moins pourrait-on se dire que cette fois, l’étiquette est la bonne et qu’elle ne bougera plus. Même pas. Depuis trois ans, le DPE n’a cessé d’être retouché. Dernière évolution en date, celle de juillet 2024 pour les logements de moins de 40 m² : selon les savantes projections du ministère, environ 140.000 logements aujourd’hui classés F et G, sortaient de la zone rouge.
Et ce n’est sans doute pas fini. Mercredi, au Sénat, la ministre du Logement, Valérie Létard, évoquait un chantier sur le DPE « d’ores et déjà engagé ». Après tout, le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, n’a-t-il pas annoncé une simplification du DPE ? On manque toutefois de précisions, mais il faut s’attendre, encore, à de nouvelles évolutions. La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher a déjà évoqué une éventuelle révision du CEP (coefficient d’énergie primaire) pour les logements chauffés à l’électricité, ce qui aurait pour effet mécanique et immédiat de faire remonter le classement de ces biens. On sait aussi que des évolutions pour le logement ancien, pour lequel le DPE se montre parfois injuste, restent sur la table.
Oui, le DPE n’a pas fini d’évoluer. Le problème c’est qu’à chaque modification, à chaque correction, c’est la valse des étiquettes. Un logement qui aura été classé D en 2020 peut très bien se retrouver en F aujourd’hui, et demain en E, à la faveur d’une énième modification. Et ce mouvement perpétuel n’aide pas vraiment à donner la crédibilité et la confiance dont le diagnostic à pourtant cruellement besoin aujourd’hui.
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