Pas d’aides lorsque le logement proposé à la location ne présente pas toutes les caractéristiques de décence. C’est ce que rappelle un récent arrêt de la Cour de cassation. Autant dire que l’irruption de la décence énergétique laisse planer une menace pour les propriétaires qui louent une passoire thermique et qui risquent de se voir privés des précieuses aides au logement.
Pour être loué, le logement doit être décent. C’est la règle. Une installation gaz et électricité sans danger, l’absence d’humidité ou de nuisibles tels que les punaises de lit, une performance énergétique minimale… La liste des critères de décence n’a cessé de s’étoffer depuis 20 ans.
Et gare aux logements qui ne cochent pas toutes les cases. L’éventail des sanctions est large : obligation de réaliser les travaux, restitution du loyer tout ou partie, et aussi suspension des aides au logement. Ce que rappelle la Cour de cassation dans un récent arrêt : « Pour ouvrir droit à une aide personnelle au logement, le logement doit répondre à des exigences de décence ».
Logement non décent : aide suspendue
A Antibes, un bailleur avait pourtant obtenu en cour d’appel le paiement des arriérés de loyers pour environ 2.400 euros. La Cour de cassation a cassé l’arrêt réduisant la somme due à 700 euros : après avoir constaté l’indécence du logement en 2021, la Caisse d’allocation familiales avait en effet suspendu le versement de son aide. « Le bailleur ne peut exiger du locataire que le paiement du montant du loyer et des charges récupérables, diminué du montant des allocations de logement.»
« Lorsque l’organisme payeur constate que le logement ne remplit pas les conditions requises pour être qualifié de décent, il conserve l’allocation de logement jusqu’à sa mise en conformité dans un délai au cours duquel le locataire s’acquitte du montant du loyer et des charges récupérables diminué du montant des allocations de logement. (…) A défaut de mise en conformité, le montant de l’allocation de logement n’est pas récupéré par le propriétaire, lequel ne peut demander au locataire le paiement de la part de loyer non perçue correspondant au montant de l’allocation conservé. »
De nouvelles facultés pour vérifier la classe énergétique
Avec une exigence de performance énergétique encore rehaussée en 2025, cet arrêt sonne comme un nouvel avertissement. Les propriétaires-bailleurs avec un DPE en G pourraient ainsi voir les aides suspendues dès le 1er janvier puisque le logement ne respectera plus le critère minimal de performance énergétique.
Encore faut-il que la Caf ou la MSA qui versent l’aide, soient informées. Justement, il n’est peut-être pas nécessaire que le locataire effectue la démarche. La loi Climat et résilience de 2021 a ouvert de nouvelles facilités pour le contrôle de cette décence énergétique. Les organismes payeurs bénéficient désormais d’un accès privilégié aux données DPE compilées par l’Observatoire de l’Ademe. En clair, nul besoin qu’un agent se déplace, la Caf et la MSA peut accéder au DPE du logement et vérifier la classe énergétique.
Cela vaut pour l’aide personnalisée au logement (APL), cela vaut aussi pour l’allocation de logement familiale (ALF) ou l’allocation de logement sociale (ALS), toutes conditionnées par la décence du logement. L’étau se resserre autour des propriétaires de passoires énergétiques qui risquent d’être tapés au portefeuille : car après le gel des loyers, les aides pourront aussi être suspendues, jusqu’à ce que le logement affiche une étiquette énergétique jugée décente.
Cour de cassation, 14 décembre 2023, n° V 22-23.267.
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