Sous quelles conditions les diagnostiqueurs pourront continuer à réaliser l’audit énergétique

Attendu depuis plusieurs semaines, parfois sujet d’âpres discussions, le décret fixant les compétences requises pour permettre au diagnostiqueur de réaliser l’audit énergétique vient de paraître. Dans le prolongement de la nouvelle certification DPE, il entérine une nouvelle inflation des compétences. Des exigences lourdes qui risquent de fermer la porte à beaucoup de cabinets. Décryptage.

De l’attestation à l’extension de certification. On ne parle plus de simple « attestation » mais bien « d’extension de certification ». L’évolution sémantique n’a rien d’anodin. Cette extension de certification devra être délivrée par le même organisme qui a certifié l’opérateur pour le DPE, naturellement accrédité pour l’extension de certification pour l’audit énergétique. La validité de l’extension de certification est donc logiquement attachée à celle de la certification DPE. Pourtant même si on parle « extension », c’est bien une nouvelle certification à part entière.

Inflation des prérequis

Que les diagnostiqueurs puissent réaliser des audits énergétiques ne plait pas à tout le monde. Certaines professions ne se sont gênées pour exprimer leurs réserves depuis deux ans. Apparemment, elles semblent avoir été entendues, car le décret se solde par une sévère inflation des prérequis pour le diagnostiqueur qui aspire à réaliser des audits énergétiques.

L’opérateur, à moins qu’il ne dispose déjà d’une attestation, devra d’abord disposer d’un minimum d’expérience avec une certification valide « au moins deux ans pendant les trois dernières années ». En clair, le nouveau certifié DPE ne pourra plus réaliser d’audit.

Le décret impose également une lourde formation initiale de 70 heures avec au moins 35 heures de pratique dont 28 heures en présentiel et 14h sur le terrain. Et pour veiller qu’il dispose bien des compétences attendues précisées dans le texte, son organisme de certification lui fera passer un examen initial théorique et pratique. Dans le détail, l’examen théorique en présentiel (1h minimum) est composé d’un QCM de 50 questions, à partir d’un référentiel national de questions. Le candidat devra obtenir plus de 75%. L’examen pratique doit durer 2h30, et devra se faire à partir du 1er mai 2025 en situation réelle.

Un suivi constant

Décrocher son extension de certification ne sera pas suffisant, il faudra aussi la conserver. Le décret fixe d’abord une obligation de formation continue. Chaque année (à l’exception de la première et de la dernière année du cycle de certification), l’auditeur certifié devra suivre une formation de 7 heures, avec au moins tous les deux ans, un cas-test. Simple formalité ? Pas sûr. Car le texte prévoit une attestation délivrée à l’issue de la formation après « vérification des acquis du stagiaire par le biais d’une évaluation ».

Plus de formation, mais aussi plus de contrôles. Sans surprise, le décret aligne le dispositif sur la nouvelle certification DPE qui débarque au 1er juillet 2024. Autrement dit, l’auditeur devra se plier à trois surveillances documentaires, et trois contrôles sur ouvrage (un en cours d’audit, deux a posteriori) « dans des délais identiques » à ceux prévus dans la nouvelle certification DPE.

Autant dire que cette nouvelle certification se révèle lourde à porter pour les cabinets de diagnostic. Pour alléger un peu et diminuer les coûts, le décret permet toutefois la mutualisation des contrôles avec ceux déjà prévus pour le DPE. Tous ces contrôles, quasi annuels, doivent cependant être regardés comme un minimum. D’autres pourront s’y ajouter à tout moment. En cas d’incohérences dans les audits, l’organisme de certification peut par exemple déclencher une opération de contrôle documentaire ou de contrôle sur ouvrage supplémentaire.

Et pour les diagnostiqueurs qui réalisaient déjà des audits ?

Que deviennent les diagnostiqueurs-auditeurs qui depuis le 1er avril 2023 réalisent déjà des audits énergétiques pour les biens classés F et G en monopropriété mis en vente ? Jusqu’ à présent, ils bénéficiaient d’une attestation les autorisant à effectuer les audits jusqu’au 31 décembre 2023.

Bonne nouvelle, cette attestation pourra être prorogée par l’organisme de certification durant 14 mois, jusqu’au 30 avril 2025 grand maximum. Et à l’issue de la prorogation ? C’est là que le bât blesse. Rien ne dit comment le diagnostiqueur peut passer automatiquement de l’actuelle attestation à la future extension de certification. Aucune dérogation, hormis pour les diagnostiqueurs qui ont déjà l’attestation mais qui n’auraient pas les deux ans de DPE minimum, qui pourront quand même prétendre à l’extension de certification.  

Pour le reste, il semble bien que le diagnostiqueur doive en passer lui aussi par une formation initiale (70 heures, on le rappelle), et un double examen théorique et pratique. La pilule est difficile à avaler pour un diagnostiqueur-auditeur qui aura parfois réalisé des audits depuis un à deux ans. L’avis du CSCEE (Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique) en octobre, semble avoir été suivi par le ministère. Oui, les diagnostiqueurs certifiés DPE pourront à l’avenir continuer à réaliser des audits, mais l’accès au marché leur est rendu aujourd’hui beaucoup plus difficile.

Décret n° 2023-1219 du 20 décembre 2023 définissant le référentiel de compétences et les modalités de contrôle de ces compétences pour les diagnostiqueurs immobiliers en vue de la réalisation de l’audit énergétique mentionné à l’article L. 126-28-1 du code de la construction et de l’habitation.

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