Le bailleur condamné à améliorer la performance énergétique du logement

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Le logement n’est pas isolé, son système de chauffage apparaît inapproprié. Classé en G, il ne pourrait vraisemblablement plus être loué aujourd’hui. Mais le bail remonte à 2005, bien avant qu’on ne parle d’interdire les passoires énergétiques. Pour autant, la justice apporte une réponse contrastée : même si le logement ne peut être qualifié de non-décent, le bailleur devra réaliser des travaux d’amélioration énergétique.  

Qui se souciait de performance énergétique au moment de signer son bail en 2005 ?  Le DPE n’existait pas encore, il ne verra le jour que l’année suivante. Quinze ans plus tard, la donne a bien changé. En 2020, après moult réclamations restées infructueuses, un couple de locataires attaque son bailleur social. Il réclame la réalisation d’un diagnostic de performance énergétique, mais aussi des travaux d’isolation et diverses indemnisations au titre leurs préjudices.  

Isolation insuffisante et chauffage inadapté

Que le logement soit une passoire n’est pas discuté. Dans son rapport, l’expert judiciaire mentionne un manque d’isolation et un chauffage inadapté. Le logement écope d’une étiquette énergétique en G. Pour le couple de locataires, il est clair que le logement ne coche pas les cases de la décence. « L’inadaptation du système de chauffage et le manque d’isolation entraînent une augmentation considérable des coûts d’énergie, de sorte qu’ils ne peuvent plus utiliser la chaudière et que des traces de moisissure sont apparues sur les murs. »

Le logement apparaît extrêmement énergivore, mais l’expert rappelle que l’interdiction de louer un logement avec une consommation d’énergie supérieure à 450 kWh par mètre carré par an en énergie finale, n’est arrivée qu’au 1er janvier 2023. Et elle ne vaut que pour les nouveaux contrats de location. « Au regard de la date de conclusion du contrat de location le 22 juillet 2005, l’expert judiciaire a donc retenu que le logement, bien qu’énergivore, peut être qualifié de décent », estime la cour d’appel de Bourges.

De plus, techniquement, rien n’empêche de chauffer « normalement » le logement, « c’est uniquement en raison des coûts engendrés par ce mode de chauffage qu’ils (les locataires) ont décidé de ne plus y avoir recours et de se tourner vers une alternative temporaire moins onéreuse ». La cour d’appel rejette donc, logiquement, la non-décence du logement et déboute les locataires de leur demande de réduction du montant de loyer.

Le bailleur devra installer une PAC

En revanche, la réponse apparaît plus contrastée sur la demande de travaux.  « Nonobstant l’absence de caractère non-décent du logement, il n’en demeure pas moins que le bailleur est tenu de remédier aux désordres affectant les locaux loués. » L’expert avait préconisé plusieurs travaux dans son rapport : isolation des combles, isolation du plancher bas de l’étage et remplacement du système de chauffage par une PAC air/eau ou un poêle à granulés. De quoi améliorer considérablement la performance énergétique du bien qui verrait son DPE bondir d’une classe G à une classe D.

Dans leur demande, les locataires privilégient l’installation d’une pompe à chaleur air-eau plutôt que d’un poêle à granulés, « en raison de l’augmentation du coût des granulés due à la crise énergétique ». Ils réclament aussi des travaux supplémentaires comme l’isolation des murs, des planchers bas, des fenêtres et une modification du système de ventilation. Autrement dit, une rénovation quasi complète du bien.

La Cour suit les préconisations de l’expert. Le bailleur devra améliorer l’isolation des combles et du plancher bas de l’étage, mais il devra en outre installer une pompe à chaleur comme le demandaient les locataires. « Bien qu’il s’agisse d’un système de chauffage plus coûteux à l’achat pour le bailleur, (…) son utilisation s’avèrera moins onéreuse pour les locataires eu égard à la forte augmentation du prix des granulés de bois, étant rappelé que (les locataires) disposaient initialement d’un système de chauffage très peu coûteux dans leur logement. » La cour d’appel laisse six mois au bailleur pour exécuter les travaux. Passé ce délai, il devra s’acquitter d’une astreinte de cinquante euros par jour.

La surconsommation d’électricité à la charge du bailleur

Le bailleur est aussi condamné à indemniser les locataires de leur surconsommation d’électricité liée au changement de mode de chauffage en 2015. Le passage d’une chaudière bois à une chaudière électrique a entraîné une nette augmentation de la facture énergétique : le bailleur devra donc verser 2.700 euros en réparation du préjudice économique. Il devra aussi indemniser les époux de leur demande de préjudice de jouissance à hauteur de 4.500 euros : faute de pouvoir chauffer correctement le logement en raison de coûts élevés, des moisissures sont en effet apparues.

Enfin, la cour d’appel accorde également des dommages-intérêts (3.500 euros) aux locataires : malgré des demandes répétées, le bailleur n’a pas réagi et n’a réalisé aucuns travaux pour mettre le logement en conformité. « En s’abstenant pendant de nombreuses années de procéder au changement du mode de chauffage du logement et à des travaux d’isolation complémentaires qu’elle ne conteste pas et alors qu’elle avait parfaitement connaissance des désordres affectant le logement, la société (le bailleur) a fait preuve de résistance abusive. »

Cour d’appel de Bourges, 4 juillet 2024, RG n° 23/00593.

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