Dans sa dernière “étude comparative”, 60 Millions de consommateurs est décidément injuste avec le DPE. Le diagnostic s’est sacrément amélioré, et le magazine qui se nourrit d’enquêtes depuis 15 ans à son encontre, devrait le savoir mieux que quiconque. Trop injuste.
Incroyable. Vingt opérateurs sélectionnés, et pas un qui n’ait proposé de faire le DPE au téléphone. Pas un qui n’ait suggéré de bidonner le diagnostic pour lui décerner un généreux A ou B. Imaginez, tous les techniciens ont fait le déplacement, ils ont même visité le logement, il y ont passé du temps, ils ont pris des mesures… Plus incroyable encore, les opérateurs savent désormais faire la différence entre simple et double vitrage !
On croit rêver. Et on imagine la déception des journalistes de 60 Millions de Consommateurs. Tout se perd, le diagnostic immobilier n’est plus ce qu’il était, et les testing moins fructueux que par le passé. Qu’on se rassure, le diagnostiqueur est sans doute un moins bon client pour la presse consumériste qu’il ne l’a été, mais il fait encore recette en semant quelques erreurs derrière lui. Ouf ! 60 Millions ne remerciera jamais assez cet indépendant du Sud-Ouest qui a sorti un mesurage à 162 m² contre 138. Ah, heureusement qu’il était là pour sauver la face.
Blague à part. Qu’il semble loin le temps où le DPE était « une loterie » dont la presse consumériste se nourrissait allègrement. Les « erreurs en pagaille » dénoncées avec tant de véhémence par le magazine semblent d’abord dues à la négligence et à des approximations. On est à des années-lumière de l’incompétence criante ou de l’impartialité franchement douteuse qui ont pu transpiré de certaines enquêtes par le passé.
Le temps et le prix
Ce qui ne veut pas dire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, que ce DPE est parfait et que le travail effectué ne souffre aucun reproche. On n’a pas dit ça. Mais en lisant et en relisant l’article, en discutant avec des techniciens, l’énorme majorité des erreurs et approximations semble avoir un dénominateur commun : le manque de temps, le manque d’attention. Exemple, le diagnostiqueur ne s’est pas donné la peine d’éplucher les factures des fenêtres ou de la ventilation qui lui auraient permis de renseigner correctement son logiciel. Il a oublié la porte de garage, il n’a pas vu le ballon d’eau chaude, il a délaissé des menuiseries, il a fait confiance à son logiciel pour les recommandations qui lui mentionnaient une PAC alors que celle-ci existait déjà… Oublis, négligences… Oui, les opérateurs sont sans doute coupables, coupables d’avoir travaillé à la va-vite, comme s’ils ne s’étaient pas donné le temps nécessaire.
Le temps, justement. Il est bien dommage que le magazine n’ait pas chronométré les opérateurs et renseigné le temps passé dans chaque bien en face des prix pratiqués. Qui sait, on aurait peut-être pu voir que plus le diagnostiqueur consacrait du temps à son DPE, moins il y avait d’erreurs… Pour être un tant soit peu rentable, pour soutenir la comparaison avec la concurrence, malheureusement, le DPE n’est pas effectué avec tous les soins que les textes exigent. C’est un fait.
Cela n’élude sans doute pas la judicieuse question de la formation ou de l’homogénéisation soulevée par le magazine, mais cela remet l’église au milieu du village. Quel prix sont prêts à mettre les pouvoirs publics et les clients pour un DPE ? Et on veut quoi à la fin : une estimation de la performance énergétique ou une vraie étude thermique ? Les pouvoirs publics n’ont jamais pris leurs responsabilités caressant le souhait de disposer d’une étude thermique fiable au prix, dérisoire, du DPE. Tant que l’on n’aura pas répondu, on aura beau réaliser toutes les formations du monde, la profession continuera à se faire épingler par 60 Millions, Que Choisir et consorts. Car même le diagnostiqueur le plus aguerri est bien obligé de commettre des impasses si on ne lui donne pas le temps nécessaire pour faire sa prestation.
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