Les annonces gouvernementales se multiplient. Questions de jours, avant que le DPE ne soit, encore, retouché pour éviter que trop de petites surfaces irrémédiablement classées comme passoires thermiques ne soient bientôt disqualifiées sur le marché locatif. Après Christophe Béchu qui évoquait une amélioration de la méthode de calcul la semaine passée, au tour de Bruno Le Maire de s’exprimer sur le sujet.
Le numéro 2 du gouvernement a déjà dit ce qu’il pensait du DPE. « Changeons le diagnostic énergétique puisque visiblement, ce n’est pas le bon indicateur », lançait-il à l’automne. La petite phrase n’était pas passée inaperçue, et le ministre en dehors de ses prérogatives s’était fait taper sur les doigts. Le remaniement ministériel a changé la donne, Bruno Le Maire a hérité du portefeuille énergie qui lui confère désormais toute légitimité pour s’exprimer sur le sujet.
Et il n’a pas changé d’opinion. Mardi, il a ainsi confirmé que le diagnostic serait corrigé en particulier pour les petites surfaces. Il affirme « continuer à penser que le DPE doit être simplifié ». « Et il le sera » ; « notamment pour que les petites surfaces soient traitées de la même manière que les surfaces plus importantes ». Un point « extrêmement important pour le logement étudiant ».
Les petites surfaces repêchées
Les diagnostiqueurs l’avaient fait remonter à leur ministère de tutelle dès l’été 2021, le DPE a cette fâcheuse tendance à pénaliser les petites surfaces. La parade existe cependant, sous la forme d’un coefficient de pondération défendu par les fédérations du diagnostic depuis deux ans. La solution devrait (enfin) être retenue par les pouvoirs publics et mise en œuvre dès 2024.
L’annonce de Bruno Le Maire intervient quelques jours après celle de Christophe Béchu. Interpellé au Sénat sur les écarts du DPE avec les consommations réelles dans le prolongement de l’étude du Conseil d’analyse économique, le ministre de la Transition écologique avait promis « des annonces en vue de corriger les biais induits par les DPE pour ce qui concerne les petites surfaces, c’est-à-dire les biens de moins de quarante mètres carrés ». Une question de jours. « Je préciserai dans quelques jours – le Premier ministre m’y a autorisé – les nouvelles règles qui vont s’appliquer. » Une annonce réitérée également le lendemain par la ministre déléguée Marie Lebec, face aux députés cette fois.
Le gouvernement ne veut (ne peut) plus attendre. Il y a urgence. Le sujet est aussi devenu politique, avec la menace de voir des passoires thermiques sorties du parc locatif dès 2025. En pleine crise du logement, cela fait pour le moins désordre.
Le casse-tête du DPE
Coefficient de pondération, petites surfaces repêchées, problème résolu ? Pas sûr. Retoucher à la méthode de calcul va sans doute soulager les propriétaires de studios, T1 ou T2, mais cette amélioration n’est pas sans soulever quelques sérieux problèmes. Ce simple correctif purement technique enclenche un engrenage infernal. Mécaniquement, des petites surfaces aujourd’hui classées F et G devraient bénéficier d’un classement énergétique plus généreux. Sous-entendu, est-ce qu’on va demander (suggérer) aux propriétaires de petites surfaces de refaire un nouveau DPE ?
Cette amélioration peut aussi ressembler à une boite de Pandore, en ouvrant la porte à d’autres modifications. Elle donne des raisons d’espérer aux acteurs du patrimoine ancien qui ont souvent dénoncé un DPE injuste avec le bâti d’avant 1948. Puisqu’il est possible de retoucher à la méthode pour sauver les petites surfaces, pourquoi ne le ferait-on pas pour le DPE ancien ? Après tout, on sait que la méthode de calcul ne prend pas très bien en compte les qualités intrinsèques de certains matériaux anciens.
Oui, ce correctif part d’un bon sentiment, et à l’évidence, il donne davantage de crédibilité au diagnostic. Mais c’est l’effet inverse qui risque de se produire. Le DPE est devenu le mètre étalon de la rénovation énergétique, il a aussi besoin de stabilité : comment expliquer qu’en bougeant un curseur, le propriétaire d’un studio hier en G demain en E, ne sera plus obligé de rénover, du moins pas tout de suite ? Cornélien.
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