La découverte d’amiante alors qu’un repérage a déjà été réalisé par le passé, peut générer de l’incompréhension chez un propriétaire. Mais cela ne signifie pas forcément que le diagnostiqueur a commis une erreur. Même pour un avant-travaux où la recherche d’amiante se veut exhaustive, mais uniquement dans le périmètre du chantier.
Attention aux projets de travaux qui évoluent au fil du temps. A l’origine, en 2013, la rénovation se cantonnait aux pièces intérieures de la villa : réfection des plafonds, des murs, des sols, changement d’affectation de certaines pièces, création de salles de bain, remplacement de fenêtres… Comme le veut la réglementation le propriétaire a donc sollicité un diagnostiqueur qui a conclu à l’absence d’amiante dans les produits et matériaux repérés.
Le projet de travaux évolue
L’histoire aurait pu en rester là. Mais le projet de travaux a beaucoup évolué au fil du temps. Trois ans ont passé, nous sommes en 2016, le propriétaire n’envisage plus seulement de réaménager l’intérieur de sa villa, il souhaite aussi une extension, une modification de la façade, la création d’une pergola, la démolition des toitures deux pentes et la création de toitures terrasses. Sacré chantier. Le budget est conséquent, 2,5 millions d’euros de travaux pour une durée de huit mois.
Mais la société chargée des travaux a un sérieux doute sur un des matériaux en toiture. Un très sérieux doute même puisqu’après une première analyse négative -suite au prélèvement réalisé toujours par le diagnostiqueur dans le cadre d’une mission ponctuelle cette fois-, il demandera confirmation avec une seconde analyses qui, elle, reviendra positive. L’amiante est bel et bien présent. Sous les tuiles, des tôles en fibrociment couvrent l’intégralité de la toiture appelée à disparaître.
Pour le propriétaire, le diagnostiqueur a commis une faute lors de son premier repérage, puisqu’il est passé à côté de cet amiante. Devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, il lui réclame 185.000 euros pour le désamiantage et la réfection de la toiture, ainsi que 100.000 euros de préjudice notamment liés aux incontournables retards subis par le chantier avec la découverte d’amiante.
Pas d’erreur de diagnostic
Du coté du diagnostiqueur, on rappelle toutefois que la première intervention s’est effectuée dans un périmètre de travaux beaucoup plus modeste. Ce qu’attestent les plans et documents transmis aux entreprises pour les appels d’offres, qui ne mentionnent aucuns travaux en toiture à l’époque.
La cour d’appel rejette les prétentions du propriétaire : le diagnostiqueur n’a commis aucune faute. A l’époque du premier repérage, « la nature des travaux envisagés consistait dans : « la réfection sols, murs, plafonds » (…) c’est-à-dire qu’elle était limitée aux travaux de réfection intérieure de la villa et qu’elle ne concernait donc pas les travaux en toiture, ni des travaux susceptibles d’avoir un impact sur la toiture ». Le diagnostiqueur avait pris soin, en 2013, de lister les pièces, éléments et matériaux ayant fait l’objet d’un repérage, et le contrôle des planchers, murs, plafonds et faux-plafonds intérieurs.
Cet arrêt rappelle toutefois combien le projet de travaux doit être clairement défini avant l’intervention du diagnostiqueur afin qu’il puisse déterminer son programme de repérage. Et combien, en cas d’évolution, il faudra solliciter un repérage complémentaire. Ce que rappelle volontiers la cour d’appel d’Aix-en-Provence. « Les travaux en toiture n’ont été envisagés qu’en cours de chantier et il appartenait dès lors (au propriétaire) de solliciter un nouveau rapport de la société Dekra en fonction de l’évolution de son projet, conformément à l’article 5 de la Norme NF X 46-020 qui exige une nouvelle mission. »
Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 11 janvier 2024, n° 20/12976.
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