Audit énergétique, gare à la précipitation  

Rien ne sert de courir. L’audit réglementaire soulève un engouement bien légitime de la part des professionnels du diagnostic désormais qualifiés, mais gare à la précipitation. Car les textes ne sont toujours pas sortis, le CSCEE vient de rendre un avis défavorable et le contenu de cet audit qui ne doit surtout pas être considéré à la légère, n’est pas totalement figé.

L’échéance ne bouge pas, on reste bien sur le 1er janvier 2022, mais faute de textes, l’audit réglementaire risque fort de ne pas être applicable tout de suite. « La date reste fixée au 1er janvier 2022, mais les textes (le décret pour les compétences et l’arrêté pour le contenu de l’audit, ndlr), ne seront pas publiés avant la fin d’année », prévient Thierry Marchand, président de la Chambre des diagnostiqueurs de la Fnaim, au sortir d’une réunion avec la ministre chargée du Logement, Emmanuelle Wargon et les professionnels de l’immobilier.

L’avis défavorable du CSCEE (Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique) ne semble pas remettre en cause la participation des diagnostiqueurs, mais en revanche, l’audit énergétique aura sans doute un peu de retard à l’allumage. Apparemment, côté ministère, on ne souhaite pas se précipiter, et on préfère attendre que le dispositif soit réellement opérationnel.

« Tous les diagnostiqueurs ne pourront pas réaliser l’audit »

Un peu plus de temps pour mieux se préparer, ce n’est sans doute pas plus mal. Ce retard à l’allumage –qui n’est pas un report, on insiste- peut calmer les esprits au sein de la filière où l’avènement de ce nouveau marché réglementaire aiguise parfois les appétits. A qui dégainera le premier. Des offres de formation ont commencé à fleurir, des cabinets réfléchissent déjà à des tarifs très concurrentiels, tout ça sans que le contenu de la prestation, où les durées de formation ne soient vraiment figés.

Comme si cet audit était un énième diagnostic supplémentaire, un simple complément au DPE. Faux, archi faux. « Nous parlons d’un audit, pas d’un DPE+ », met en garde Thierry Marchand. « Un audit dans une petite maison, c’est une journée de boulot minimum. Tous les diagnostiqueurs ne pourront pas réaliser cet audit qui réclame des compétences à la fois en ingénierie, en thermique, en économie de la construction. Sur les 9.000 opérateurs certifiés pour le DPE, un tiers est aujourd’hui en capacité d’accéder à ce marché selon moi. »

« Une autre démarche intellectuelle »

« Que les diagnostiqueurs puissent réaliser cet audit apparaît légitime, cela fait partie de notre ADN d’intervenir en amont de la vente. Mais chacun doit comprendre que nous sommes sur une démarche intellectuelle différente des diagnostics immobiliers. » Certes, l’auditeur pourra s’appuyer sur le DPE réalisé, mais il devra le vérifier, et surtout le compléter puisque « les valeurs par défaut ne seront pas tolérées ». Simple exemple, face à un mur, le technicien devra donc caractériser précisément l’isolation. Et cela vaut aussi pour le volet conseil. « Aucun logiciel ne pourra sortir les scénarios de travaux et les prix automatiquement. »

Du coup deux jours de formation –comme le proposent déjà certains organismes- risquent peut-être de se révéler insuffisants. « Ce programme de deux jours de formation n’est pas applicable pour le diagnostiqueur », prévient Thierry Marchand. « Pour ma part, je plaide pour une formation de trois jours minimum si on veut aussi intégrer un volet sur les pathologies de l’immeuble. » Tant que les textes ne sont pas encore sortis, les curseurs peuvent encore bouger. Rien ne sert de courir, il faut partir à point.