Mérule à la suite d’une inondation : l’assureur devra réparer les dégâts

Diagnostic-Merule

Face à la mérule et à son traitement souvent très lourd, les assureurs rechignent parfois à indemniser des propriétaires désemparés. Parce que le champignon serait le résultat d’un défaut d’entretien ou d’une négligence, ils refusent leur garantie. Face à la justice, un propriétaire d’une maison infestée par le champignon à la suite d’une inondation obtient pourtant gain de cause.

Un sinistre peut en cacher un autre. Au printemps 2016, une maison troglodyte du Loiret est d’abord victime d’une inondation par infiltrations à la suite de fortes pluies. La commune sera reconnue en état de catastrophe naturelle dans les mois suivants.

Le préjudice est double. Car faute de travaux immédiats suite à l’inondation, l’humidité s’est installée et une mérule s’est développée, s’attaquant aux bois du logement. Selon le propriétaire, la faute en revient à la compagnie d’assurance qui a traîné dans la gestion du sinistre. Elle disposait pourtant de tous les éléments quelques mois après l’inondation pour formuler une proposition d’indemnisation et adresser une provision sur l’indemnisation définitive.

L’assureur rechigne à payer

L’assurance refuse toutefois sa garantie. D’abord, les dommages matériels n’auraient rien à voir avec les inondations de 2016 mais résulteraient plutôt d’infiltrations d’eau liées à la particularité du bien creusé dans le coteau. Autrement dit, le sinistre peut entrer dans le cadre de la garantie dégât des eaux, avec un plafond qui s’applique, mais en revanche la garantie catastrophe naturelle n’a pas vocation à s’appliquer.

L’assureur refuse également sa garantie pour les dégâts causés par la mérule. Le développement du champignon s’expliquerait à la fois par la spécificité de l’habitation, et la négligence du propriétaire qui n’a pas pris les dispositions nécessaires pour préserver son bien d’une aggravation des dommages, notamment avec une ventilation non conforme au sein de l’habitation. En cas de sinistre, l’assuré doit prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour limiter l’importance des dommages, sauvegarder les biens assurés, et veiller à leur conservation pour justement éviter toute aggravation. Pour l’assureur, c’est bel et bien l’inaction de l’assuré qui a favorisé l’apparition du champignon.

La mérule est bien une conséquence de l’inondation

La cour d’appel d’Orléans rejette en bloc l’argumentation de l’assureur et confirme le jugement de première instance. La mérule a bien « été favorisée par le caractère troglodyte de l’habitat et son absence de ventilation », mais « l’inondation par infiltration est néanmoins la cause déterminante de l’apparition de ce champignon dans cet habitat confiné ». Moralité, « les dommages matériels relatifs à l’apparition de la mérule doivent être indemnisés ».

Oui, mais à quel titre? Au titre de la garantie dégâts des eaux? Ou de la garantie catastrophe naturelle? La cour d’appel tranche également en faveur du propriétaire. « L’état de catastrophe naturelle ayant été reconnu, le sinistre causé par les eaux de ruissellement ne relève donc pas de la garantie dégâts des eaux, mais de la garantie au titre des effets des catastrophes naturelles. » La cour d’appel souligne au passage le « caractère important des infiltrations d’eau dans l’habitation (démontrant) l’action exceptionnelle d’un agent naturel, et non un simple phénomène d’infiltration qui serait causé par une pluviométrie ordinaire ».

Après sept longues années de procédure, le propriétaire obtient enfin gain de cause. Son assurance devra l’indemniser à hauteur de plus de 60.000 euros, entre les travaux de dépose, les travaux de reprise des désordres, et les travaux pour rendre à nouveau le logement habitable.

Cour d’appel, 17 octobre 2023, n° 20-02685.

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