Les notaires veulent (aussi) revoir le DPE

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Le rapport fait pas mal de bruit ces derniers jours. Le Conseil supérieur du notariat (CSN) a planché sur la transition énergétique des bâtiments et en a tiré dix propositions « réalistes et réalisables » selon Sophie Sabot-Barcet, sa présidente. Inspiré par les remontées de terrain, le CSN propose notamment d’apporter plusieurs corrections au DPE.

Il faut aussi se mettre à la place du consommateur: la situation est confuse. Car si le DPE a été réformé en 2021, il reste encore d’anciens diagnostics en circulation utilisés pour la vente ou la location. Après tout, les diagnostics établis entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 restent officiellement valables 31 décembre 2024. A l’époque, le législateur avait prévu cette période transitoire, doutant de la capacité des diagnostiqueurs à faire face à un tel afflux de DPE à refaire en si peu de temps.

Entre DPE ancienne et nouvelle version : « une incohérence totale »

Mais aujourd’hui, cette cohabitation entre anciens et nouveaux DPE apparaît comme une « incohérence totale ». Le CSN a réalisé un sondage, 84,2% des notaires estiment « qu’il est urgent de mettre fin à la période transitoire de la validité d’un DPE qui n’est plus en phase avec l’importance des enjeux ».

La production d’un « diagnostic techniquement désuet, mais juridiquement valable (…) potentiellement plus clément qu’un diagnostic réalisé selon la méthode actuelle » peut en effet exonérer un propriétaire de réaliser l’audit énergétique obligatoire en cas de vente de passoire classée F ou G. Autre lacune des anciens diagnostics, la consommation en énergie finale n’est pas clairement exprimée, bien que celle-ci est désormais nécessaire depuis 2023 pour savoir si le logement est décent. « Une telle situation n’est pas à la hauteur des enjeux financiers, environnementaux et patrimoniaux de la politique de rénovation énergétique de notre pays », expliquent les auteurs du rapport.

Les Notaires demandent donc à « mettre fin aux délais transitoires de validité initialement prévus pour les DPE délivrés entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 » mais aussi « ceux délivrés avant le 8 octobre 2021 ». On s’en souvient, les premiers pas du DPE à l’été 2021 s’étaient révélés chaotiques au point que le ministère avait dû revoir sa copie, et lancer une nouvelle version du diagnostic quelques mois plus tard.

Copros : un DPE à l’immeuble, un point c’est tout

La situation est aussi confuse en copropriété avec des écarts de classes énergétiques entre un DPE logement et un DPE collectif. On le sait, au sein d’un même immeuble, tous les logements ne sont pas classés de la même manière : l’appartement du dernier étage, sous les toits, avec davantage de déperditions, risque d’être plus mal classé que l’appartement qui compte des voisins de part et d’autre, en dessous comme au-dessus. Du coup, tous les copropriétaires n’ont pas le même intérêt, ni la même urgence à se lancer dans des travaux. « Des DPE individuels différents par logement induisent des comportements tout aussi différents », relève ainsi le CSN.

Pour y remédier, les Notaires proposent une mesure radicale: supprimer « l’exigence d’un DPE individuel dans le cadre d’une vente d’un lot de copropriété » et le remplacer par une obligation « de faire établir un DPE collectif unique ». « L’esprit de la loi est, par ailleurs, d’améliorer le parc de logements dans son ensemble : par conséquent, c’est naturellement au niveau de l’immeuble entier que la performance énergétique devrait être qualifiée. » Corolaire de cette mesure, les notaires attirent l’attention sur la faiblesse des DPE collectifs réalisés alors que la réglementation impose le diagnostic depuis le 1er janvier 2024 uniquement pour les copros de plus de 200 lots. « Les notaires font le constat sur le terrain que peu de copropriétés ont initié la mise en œuvre de la démarche d’établissement d’un DPE collectif. » Mais ils proposent aussi

Fiabiliser encore le diagnostic et le diagnostiqueur

Pour les petites surfaces, c’est fait. Les propriétaires de logements de moins de 40m² pourront bientôt éditer leur nouvelle étiquette. Pour le bâti ancien, en revanche, rien n’a été décidé à ce jour malgré les nombreux cris d’alarme lancés par les acteurs du patrimoine qui dénoncent une méthode 3CL aujourd’hui inadaptée. Ce que confirment les remontées de terrain chez les notaires : « L’impression générale est que les DPE ne tiennent pas compte des spécificités des bâtiments et donnent un «score» selon des critères généraux et uniformes, mais ne tenant pas forcément compte de la réalité des biens. »

La critique vaut aussi bien pour le DPE que pour l’audit qui use de la même méthode 3CL. « Il convient donc d’envisager une adaptation aux méthodes et aux matériaux utilisés lors de l’édification de ce type de construction, en ce compris pour définir les pistes d’amélioration de la performance énergétique, laquelle ne pourra pas être acquise selon les mêmes procédés que pour un logement moderne. »

La méthode de calcul n’est pas la seule à être mise en cause, les notaires pointent du doigt aussi « le délicat sujet de la qualité de la formation et des usages des professionnels réalisant les DPE ». Bien sûr, le gouvernement a déjà pris des mesures en renforçant les compétences des diagnostiqueurs, un nouveau dispositif entrera en vigueur au 1er juillet, mais les Notaires craignent qu’il ne mette du temps à produire ses effets. « Il y a peu de chance que l’on entrevoie rapidement une amélioration de la situation les obligations juridiques des propriétaires de biens immobiliers à usage de logements reposant donc, pour le moment, sur documents pour le moins perfectibles ».

Dit autrement, on en demande peut-être trop à ce DPE qui, à l’origine, n’avait pas été taillé pour ça. C’est d’ailleurs ce que semble penser une large majorité des notaires selon l’enquête réalisée par le CSN : “87,8% des notaires (…) considèrent ainsi que le DPE, conçu en 2006 comme un simple outil d’information et de sensibilisation, est aujourd’hui devenu un document auquel sont désormais attachées des conséquences juridiques et financières qui vont au-delà de la qualité objective des diagnostics produits.”

Télécharger le rapport du Conseil supérieur du notariat.

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