Pour sortir des énergies fossile, le gouvernement encourage la pompe à chaleur à grands coups de primes. Si leur rôle dans une économie décarbonée fait plutôt consensus, quelques précautions sont à prendre. D’abord isoler, puis ventiler, avant de penser chauffage. Une étude de négaWatt du Cler souligne que ce n’est pas toujours fait dans le bon sens.
Elle est la principale porte de sortie des énergies fossiles. Avec le fuel interdit dans le neuf, le gaz privé d’aides depuis le 1er janvier 2023, la pompe à chaleur a déjà vu ses ventes bondir: + de 30% en 2022. La conversion du parc est largement entamée, elle risque encore de s’accélérer, puisque l’Europe envisage d’interdire purement et simplement toute énergie fossile à horizon 2035 voire 2040.
On n’y est pas encore. Pour le moment, l’État reste dans l’incitation avec des subventions qui ne cessent d’enfler. Avec la guerre en Ukraine, les équipements à énergie renouvelable avaient déjà bénéficié d’un bonus de 1.000 euros avec MaPrimeRénov’. Coup de pouce supplémentaire, depuis le 1er mars, les ménages qui troquent leur vieille chaudière fioul, gaz ou charbon pour une PAC ou du solaire, bénéficient de 5.000 euros minimum grâce aux Certificats d’économies d’énergie. C’est tentant. D’autant que l’installation d’une pompe à chaleur peut aider le logement à obtenir un meilleur DPE, et peut-être même sortir de la zone rouge.
La PAC reste peu appropriée dans une passoire thermique…
C’est tentant, mais la pompe à chaleur n’a rien d’une solution miracle. Et ça ne suffira pas à transformer une passoire en logement vertueux. Pire, si l’enveloppe du bâtiment continue à laisser fuir les calories vers l’extérieur, les occupants risquent d’avoir plus froid encore qu’avec leur bonne vieille chaudière au gaz ou au fuel.
“Dans les bâtiments classés F ou G – souvent anciens, datant d’avant 1975-, l’installation de PAC ordinaires en remplacement de chaudières sans action de rénovation énergétique associée n’est pas appropriée”, expliquent les auteurs de l’étude technique de négaWatt/Cler-Réseau de transition énergétique sortie en début d’année. Que la température chute en dessous de 5°C (ou 9°C selon les cas), et la PAC ne sera plus en mesure de fournir une puissance suffisante pour chauffer correctement le logement. “Il en résultera une insuffisance de la température intérieure ne dépassant pas 14°C par grand froid et donc un important inconfort thermique.”
Bien sûr, des alternatives existent sur le marché pour installer une PAC, même dans une passoire thermique. Mais là aussi, négaWatt et le Cler mettent en garde contre “plusieurs effets rebonds dommageables”. “Les PAC haute température et surtout les PAC adossées à des convecteurs électriques génèrent de nouvelles consommations d’électricité et des puissances appelées très problématiques du point de vue de la gestion du réseau électrique.”
Pour les PAC en relève de chaudières, c’est plutôt les émissions de gaz à effet de serre qui posent problème. “Elles réduisent insuffisamment les émissions de GES en maintenant à long terme des consommations d’énergie fossile importantes, et génèrent un coût de chauffage élevé lié au double abonnement gaz et électrique pour le consommateur.”
… mais fortement recommandée dans une rénovation globale
Moralité, avant de songer à une PAC, il faut d’abord isoler et ventiler. Loin de remettre en cause les bienfaits de la PAC, l’étude rappelle que l’équipement doit s’inscrire dans une démarche de rénovation globale si on veut vraiment en tirer bénéfice pour la facture énergétique et pour la planète. “Lorsque l’installation d’une PAC est effectuée dans le cadre d’une rénovation performante au niveau BBC (réduction des déperditions d’un facteur 3 à 4,5), celle-ci génère d’excellents résultats en matière de réduction des consommations, des appels de puissance électrique et des émissions de GES.”
C’est bien le message que les auteurs de l’étude tentent de distiller auprès du pouvoir politique. Plutôt que de distribuer des superbonus aux PAC, négaWatt et le Cler plaident pour une restructuration des aides afin de combiner rénovation globale et installation d’une PAC, et le passage obligatoire d’un conseiller énergétique, impartial et indépendant, en cas de changement de chauffage. Histoire qu’après l’installation d’une pompe à chaleur flambant neuve, malgré les milliers et milliers d’euros engloutis, on ne s’aperçoive pas qu’on a encore plus froid chez soi qu’auparavant.
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