Tantôt louée, tantôt critiquée. MaPrimeRénov’ a sans doute contribué comme jamais à doper la rénovation énergétique. Revers de la médaille, plus elle se démocratise, plus ses lacunes deviennent embarrassantes. Côté gouvernement, les annonces se multiplient pour évoquer une prochaine refonte.
On peut au moins lui reconnaître ça. En matière de massification, MaPrimeRénov’ a réussi là où les dispositifs antérieurs -et ils ont été nombreux en quinze ans- avaient souvent échoué. Avec la prime de transition énergétique, les travaux de rénovation énergétique ont sans doute fait un bond de géant. Les chiffres parlent d’eux mêmes: 650.000 primes distribuées en 2021, et le cru 2022 reste sur la même lancée. Au premier semestre, l’Anah (Agence nationale de l’habitat) enregistrait déjà 377.000 demandes et 318.000 travaux financés.
Le ton a toutefois changé au sein du gouvernement. Il y a encore quelques mois, on se targuait de 700.000 rénovations par an sans autres distinction. Sur le plateau de France 5, le 5 septembre dernier, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, parlait cette fois de “gestes de rénovation”. La nuance a son importance.
Car au-delà des chiffres, il existe une réalité maintes fois dénoncée par les associations et même soulignée par la Cour des comptes: on rencontre les plus grandes difficultés à mesurer la véritable efficacité de MaPrimeRénov’. Tout simplement parce que les aides octroyées ne sont pas conditionnées à l’atteinte d’une performance énergétique minimale. Selon la Cour des comptes, en 2021, seulement 2.500 passoires énergétiques se sont affranchies de ce statut encombrant, loin très loin des 80.000 initialement espérées. Dit autrement, des milliards d’euros ont déjà été engloutis par la prime de transition énergétique, mais sans que l’on sache au juste dans quelle mesure ces travaux ont abaissé la consommation énergétique et les émissions de gaz à effet de serre des Français.
Rallonge budgétaire
Le gouvernement revoit donc sa copie. Première annonce, MaPrimeRénov’ bénéficiera de crédits supplémentaires. Comme l’avait annoncé Emmanuel Macron durant la campagne présidentielle. Selon les informations recueillies auprès d’un ministre par France Info en début de semaine, la prime vedette du gouvernement passerait de 2 à 2,6 milliards d’euros dans le prochain projet de loi de finance qui devrait être présenté le 28 septembre. Une rallonge nécessaire puisque qu’avec 1,2 milliard d’aides consommé rien que pour le premier semestre 2022, le budget est étriqué.
Deuxième évolution annoncée, pour répondre aux critiques, MaPrimeRénov’ sera réorientée davantage vers des rénovations globales, et moins vers des petits gestes. Près de neuf primes sur dix en 2021 concernaient des travaux dits “mono-geste”, la plupart du temps pour changer son équipement de chauffage. Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, évoquait en début de mois, face au Medef, une possible évolution de la prime en prenant davantage en compte la dimension carbone.
Olivier Klein en a remis une couche mardi, sur LCI. Si le ministre chargé du Logement défend le bilan de MaPrimeRénov’ depuis son lancement en 2020, dont les travaux ont permis d’économiser l’équivalent de la consommation d’une ville comme Lyon, il reconnaît toutefois la nécessité de “massifier” les rénovations globales. “Il faut aller plus loin sur la recherche de la performance.”
Olivier Klein le dit, il compte beaucoup sur le décollage de MonAccompagnateurRénov’ prévu pour 2023, avec l’arrivée d’acteurs privés. Petit bémol cependant, ce recours obligatoire à un professionnel tiers de confiance ne s’appliquera pas à tous les chantiers: uniquement pour les travaux menés dans le cadre d’une rénovation globale lorsque leur montant dépasse 5.000 euros, et lorsque l’on compte deux gestes avec plus de 5.000 euros d’aides. Autrement dit, les travaux mono-gestes, dont l’efficacité est souvent contestée, risquent bien de se poursuivre en 2023.
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