Le chauffage insuffisant rend le logement inconfortable, le bailleur est condamné

Le propriétaire d’une passoire thermique pense peut-être bénéficier d’un sursis jusque 2025 voire 2028. Mais la justice apporte (à nouveau) un cinglant démenti: la décence énergétique est d’ores et déjà une notion qui pèse lourd devant les tribunaux. Parce que le chauffage se révélait insuffisant dans le logement loué, un bailleur est condamné à indemniser son locataire.

Peu importe la classe énergétique, qu’un locataire ne parvienne pas à chauffer son logement est suffisant aux yeux de la justice pour condamner le propriétaire. Début janvier, une locataire avait déjà obtenu la condamnation de son bailleur au motif que la chaudière, sous-dimensionnée, ne permettait pas de chauffer correctement le logement. Rebelote à peine trois semaines plus tard.

Face à la justice, le locataire se plaint aussi d’un manque de chauffage dans sa maison par temps froid. Quelle étiquette énergétique affiche le bien? On ne le saura pas, la propriétaire n’a remis aucun DPE à la prise de bail en 2015. Pour appuyer sa demande, le locataire invoque donc un système de pompe à chaleur réversible “inapte à garantir un chauffage suffisant des locaux, au moins par temps de grand froid”, une cheminée à bois défaillante et aussi plusieurs fenêtres en piteux état.

L’argument fait mouche auprès de la cour d’appel de Besançon. “L’installation de chauffage était effectivement insuffisante pour assurer un niveau de confort correct par temps froid, du fait du dysfonctionnement de la cheminée et de la mauvaise étanchéité de fenêtres, désordres auxquels il n’est pas justifié qu’il ait été effectivement remédié, malgré les demandes formées à ce titre par le locataire“.

Inconfort = préjudice de jouissance = dommages et intérêts

Sans même parler de “décence énergétique” ou de “passoire thermique”, la cour d’appel reconnaît donc “un préjudice de jouissance résultant de l’inconfort auquel (le locataire) a été exposé”. Le locataire réclamait un tiers du loyer sur les périodes de chauffe d’octobre à mai, la justice a considéré cette demande “surévaluée”. La cour d’appel estime en effet que durant les périodes de demi-saison où le besoin de chauffage est moindre, la pompe à chaleur remplissait son rôle. Les dommages et intérêts sont donc ramenés à 150 euros par mois sur 15 mois (de novembre à mars pour les années 2015 à 2018), 2.250 euros au total que le bailleur devra verser à son locataire.

En revanche, sur l’absence de DPE au moment de louer, le locataire qui avait pourtant obtenu gain de cause en première instance, est cette fois débouté. Car si l’absence de DPE constitue bien une faute du bailleur (“la communication du DPE a pour objet de permettre au locataire d’appréhender le niveau des dépenses énergétiques auxquelles il devra faire face dans le cadre d’une utilisation normale des lieux, notamment en termes de chauffage”, rappelle la cour d’appel), “cette carence n’est assortie d’aucune sanction spécifique”. Le locataire peut bien prétendre à une indemnisation, mais encore doit-il démontrer le préjudice subi en l’absence de communication de ces documents. Or dans le cas présent, la consommation annuelle d’électricité produite par le locataire, reste inférieure à la moyenne de la consommation des foyers similaires. La demande d’indemnisation de 1.000 euros en raison de l’absence de DPE est donc retoquée, de même que sa demande d’indemnisation pour surconsommation électrique puisque celle-ci n’est pas établie.

Cour d’appel de Besançon, 24 janvier 2023, n° 21-00367.

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