Le diagnostiqueur devait signaler le bardage amiante au titre de son devoir de conseil

Bardage amiante

Les bardages extérieurs n’entraient pas dans la liste de son repérage à la date d’intervention du diagnostiqueur. Qu’importe, chargé également du DPE, il a forcément inspecté toute la maison et n’a pas pu passer à côté. La justice attire ainsi l’attention sur la notion de devoir de conseil.

Le diagnostic vente remonte à juin 2010. A l’époque, donc, les éléments extérieurs (façades, bardages ou toitures) restaient exclus du programme du repérage du diagnostiqueur. Ce dernier a bien signalé la présence d’amiante en bon état dans les murs et le plafond de l’abri de jardin, mais pas sur la façade de la maison. Problème, les acquéreurs qui souhaitent lancer des travaux de ravalement de façade, découvriront que l’amiante se trouve aussi dans le bardage isolant extérieur de l’habitation; des plaques de fibrociment recouvertes d’un enduit plastique épais, le même matériau que pour l’abri de jardin. La machine judiciaire s’enclenche.

Du côté du diagnostiqueur, on rappelle qu’à la date d’intervention, le bardage n’entrait pas encore dans la liste B. Il faudra attendre le décret de 3 juin 2011 qui fait évoluer le programme de repérage, mais seulement à partir de 2013. Aucune faute du diagnostiqueur donc, celui-ci s’est conformé à la réglementation en vigueur. En première instance, les propriétaires du bien seront donc déboutés.

Selon l’expert, la présence du bardage amiante n’a pu échapper au diagnostiqueur.

Dans un arrêt daté de fin mars, la cour d’appel de Bourges balaye cependant ce jugement. Selon l’expert, la présence du bardage susceptible de contenir de l’amiante n’a pu échapper au diagnostiqueur. “Cet état de fait peut être constaté « avec évidence » dans le cadre d’un « simple examen visuel des bâtiments ”, cite l’arrêt. L’expert a ainsi jugé “étonnant que l’opérateur de repérage amiante (…) n’ait pas fait ce constat tellement évident”.

“Le diagnostiqueur, présumé sachant dans le domaine de l’amiante (…) est tenu d’une obligation d’information et de conseil lui imposant de signaler, dans son rapport, la présence d’amiante dans le bâtiment.”

Qu’importe que le bardage n’entre pas dans le périmètre du repérage, la cour d’appel se range à l’avis de l’expert. “Le diagnostiqueur, présumé sachant dans le domaine de l’amiante et dont l’intervention a précisément pour but d’informer les parties au contrat de vente de la présence, ou non, d’un tel élément dans l’immeuble considéré, est tenu d’une obligation d’information et de conseil lui imposant de signaler, dans son rapport, la présence d’amiante dans le bâtiment considéré dont il a pu se convaincre sans procéder à des travaux destructifs, ou, à tout le moins, de formuler des réserves expresses à cet égard.”

La société de diagnostic n’a pu passer à côté, d’autant qu’elle a aussi réalisé le DPE “dans le cadre duquel elle a nécessairement procédé à un examen de l’ensemble de la maison d’habitation et a, d’ailleurs, noté (…) : « logement : parpaings isolé par l’extérieur »”. Conclusion, le diagnostiqueur “a manqué à son obligation d’information et de conseil”.

Le jugement est donc révisé. La note est salée pour le diagnostiqueur condamné à prendre en charge le désamiantage. “Le préjudice (…) découlant directement de ladite faute, correspond nécessairement, en premier lieu, au coût des travaux de désamiantage dont le caractère nécessaire ne saurait être sérieusement contesté.” Les propriétaires réclamaient plus de 114.000 euros, la cour d’appel retient une estimation médiane des trois devis fournis par l’expert, soit 55.000 euros. La société de diagnostic devra aussi s’acquitter des coûts de travaux d’isolation pour un total de 40.000 euros: “la nécessité de procéder à une nouvelle isolation de la maison d’habitation des appelants par l’extérieur apparaît également être en lien direct avec la faute commise par le diagnostiqueur”. Ajoutons à cela le préjudice de jouissance estimé à 4.000 euros, et l’indemnité pour les frais de justice estimée à 2.000 euros, le montant de la condamnation dépasse les 100.000 euros.

Cour d’appel de Bourges, 1ère chambre, 31 mars 2022, n° 21/00248.

2 Commentaires

  1. Jugement en appel qui à mon avis ne tiendrait pas en cassation … Sinon il faudrait peut être aussi chercher les colles à carrelages, les mastics vitriers etc …. soit près d’une centaine de MPCA alors même que ceux-ci ne sont pas demandé. Et quid des DAPP ? on parle aussi dans ce cas de la liste B ? Allez,un diag démol pour tout le monde 😉

  2. Bon allez, on arrête Mr le juge de la Cour d’Appel de Bourges, vous n’avez donc pas fouillé dans les jurisprudences en Cassation ! Vous auriez trouvé l’arrêt en Cassation N°20-19.513 du 10 novembre 2021 qui confirme justement la position opposée à la vôtre …

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