La rénovation énergétique gagne du terrain à coups de milliards d’euros. Mais les gains énergétiques des travaux ainsi financés restent encore à prouver. Après l’audit de la Cour des comptes, au tour du comité d’évaluation de France relance de s’interroger sur l’efficacité réelle des dispositifs de rénovation mis en place dans le cadre du Plan de relance et de son enveloppe de 100 milliards d’euros.
A première vue, on se dit que le chantier de la rénovation a enfin décollé, avec des chiffres qui enflent mois après mois et sur lesquels les pouvoirs publics communiquent avec allégresse. Oui, MaPrimeRénov’ pulvérise tous les records et semble, enfin, ouvrir la voie à la massification de la rénovation énergétique avec 1,8 milliard d’euros de primes déjà distribuées entre janvier 2020 et septembre 2021, et une rallonge de deux milliards d’euros prévue par le projet de loi de finance 2022. En soi, l’un des objectifs assigné par le Plan de relance semble atteint.
Des gains purement théoriques
Mais il y a cette question de l’efficacité, puisque l’octroi des primes n’est plus lié à un objectif de performance énergétique minimal. Dit autrement, le gain énergétique est-il à la hauteur des ambitions et des sommes englouties? Et combien de logements sont sortis de la zone rouge des passoires énergétiques? L’Agence nationale de l’habitat (Anah) ambitionnait 80.000 passoires énergétiques éradiquées par an grâce à MaPrimeRénov’, impossible de dire si l’objectif est atteint ou non.
Car pour le moment, les gains restent purement théoriques. De l’ordre de 1,7 TWh/an, pour le premier semestre, “l’équivalent de 0,4 % de la consommation énergétique des résidences principales en France en 2019“. Comme la Cour des comptes, le comité d’évaluation de France relance souligne combien la politique actuelle favorise avant tout les mono-gestes qui représentent 86% des travaux financés, tandis que les rénovations globales ne pèsent que 0,1%. Pas forcément un bon point quand on sait combien il est difficile d’améliorer significativement la performance énergétique d’un bien, sans un bouquet de travaux.
Une solution serait sans doute d’associer un audit énergétique à chaque dossier. Pourquoi pas. Dans son rapport publié mardi, le comité d’évaluation y songe: la solution permettrait de mesurer effectivement les gains de performance énergétique, mais il craint cependant que cela n’augmente le reste à charge des ménages et que cela ne nuise à la simplicité. Comme si la massification et l’efficacité devaient nécessairement s’opposer.
Pour le logement comme pour le bâtiment public
Et le constat vaut aussi pour la rénovation des bâtiments publics, autre volet du Plan de relance. Avec plus de la moitié du parc appartenant à une classe inférieure ou égale à D, le chantier est énorme: quatre milliards d’euros ont été engagés dans le cadre du Plan de relance sur 2021-2022, et au total, plus de 4.200 chantiers ont déjà été sélectionnés pour un devis de 2,8 milliards d’euros.
Là aussi, on a privilégié la massification à l’efficacité. “Le dispositif a ainsi financé une large palette de travaux sans nécessairement prioriser les gestes les plus efficients, dès lors que les projets ont été sélectionnés sur la base d’un ensemble de critères, dont la performance énergétique annoncée ne représentait qu’une partie“, selon le comité d’évaluation de France relance. D’autant que le gouvernement a voulu avancer vite. “Pour les bâtiments de l’État, des départements et des communes, la rapidité d’exécution fut une condition d’éligibilité, la performance environnementale des travaux l’un des critères de sélection.”
Et comme pour MaPrimeRénov’, l’impact réel des rénovations énergétiques des bâtiments des collectivités locales financées par les milliards d’euros du plan de relance reste difficile à apprécier. “L’effet réel sur la consommation énergétique et sur les émissions de gaz à effet de serre de l’ensemble des rénovations énergétiques (bâtiments publics et logements privés) soutenues par le plan de relance est encore à évaluer.”
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